Les successions ont toujours été à la fois problématiques et profitables dans l'histoire romanesque du groupe Barrière : sera-ce encore le cas pour celle de dominique desseigne ?
Il y a du romanesque dans l'histoire des hôtels et casinos Barrière. Elle fit d'ailleurs l'objet d'un roman, « L'Oncle », signé par Pierre Rey, écrivain jet-setter que l'actuel PDG, dominique desseigne, avait croisé dans sa jeunesse. Le romancier y racontait la vie de François André, le fondateur du groupe, paysan de l'Ardèche devenu gérant de tripots, qui s'appuya sur la vogue des casinos et des bains de mer pour construire, au début du XXe siècle, les hôtels mythiques de Deauville, ou de La Baule. Mais son vrai décollage, l'entreprise le doit à une impossible succession : faute de descendant, François André passa les rênes à son neveu Lucien Barrière en 1962. C'est ce dernier qui, avec un sens du marketing indéniable, inventa, dans les années 1970, le « resort à la française ». En étendant à plusieurs stations balnéaires, une offre combinant les loisirs et le business, avec des établissements de standing dotés d'une forte capacité d'accueil, des casinos et des équipements sportifs pour clientèle huppée. La disparition brutale et prématurée de celui qui avait étroitement associé cette stratégie réussie à son nom posa à nouveau un problème de relève : on le sait, sa fille adoptive, Diane, ne l'exerça que cinq ans à peine, à cause d'un terrible accident d'avion, et c'est dominique desseigne, son mari peu préparé à ce défi, qui dût s'atteler à la tâche. Il a su internationaliser la marque, notamment par l'entremise du «Fouquet's», tout en préparant le passage de relais, pour qu'il soit assuré, le moment venu, par les deux enfants du couple. Mais un nouvel imprévu est venu troubler ce scénario bien huilé : le Covid et ses confinements qui ont fortement secoué le paquebot familial. Si la fatalité des successions compliquées semble peser sur le destin du groupe, il reste à espérer que celle-là, comme les précédentes, parviendra une fois encore à le renforcer.
(source lesechos.fr/Henri Gibier)