La baisse d'activité des treize casinos bas-normands s'est accentuée en 2013. Crise économique, joueurs moins nombreux... Ces établissements misent sur la restauration et les animations pour compenser.
La crise de plein fouet
Les casinos du Sud-Manche ont le plus souffert en 2013 (clôture de l'exercice le 31 octobre) : -8,85 % pour Granville et -8 % à Saint-Pair. « On prend la crise de plein fouet », analyse Laurent Lenoir, de Granville. « Le bel été n'a pas rattrapé la neige en début d'année et un mauvais printemps. » Les premières tendances en décembre (-20 %) et janvier n'invitent pas à l'optimisme. « Les joueurs viennent moins souvent et restent moins longtemps. »
Les petits un peu mieux
La baisse est générale. Les petits casinos de 75 machines (comparé aux 350 de Deauville) et trois tables de saint-aubin-sur-Mer, d'Agon-Coutainville ou d'Houlgate s'en sortent mieux. Pour Frédéric Vespier d'Agon « la fidélisation de notre clientèle nous permet de limiter la casse ».
Hors jeux
Comment endiguer cette baisse « qui remonte à 2007 » estime Franck Bosquet, passé de saint-aubin à Luc. Avec une baisse cumulée de 22 % en sept ans. « Créer un climat convivial, être plus présent auprès du client... » Ou « revoir le marketing et réduire les charges », penche François Bletel, de Cherbourg et ses 64 salariés. Autre solution : développer des activités annexes. « Le hors jeux représente désormais 50 % de notre chiffre d'affaires », témoigne Stéphane Gilquin, directeur du casino de Cabourg. « Avec 40 000 couverts et un chiffre d'affaires d'1,7 million d'euros, le restaurant avec vue sur mer est notre oxygène. » En août, 1 000 visiteurs par jour ont présenté leur papier d'identité à Cabourg... sans jouer.
Joueurs locaux
Exceptés Deauville et Cabourg fréquentés par les Parisiens, les casinos bas-normands ont une clientèle locale. A 95 % du Cotentin pour Cherbourg ; de Caen pour Luc-sur-Mer, Ouistreham et saint-aubin. Et d'Alençon, Argentan, Flers pour Bagnoles.
Taxes et contrôle
« Quand ils étaient en expansion, l'État taxait toujours plus les casinos. Aujourd'hui, la taxation doit changer », dit François Bletel. Le directeur du casino de Cherbourg pointe une autre cause du déclin : « Le contrôle à l'entrée. Il suffit qu'une personne dans un groupe n'ait pas ses papiers d'identité pour que tout le monde reparte. »
Deux poids, deux mesures
Les casinotiers se sentent un peu les mal aimés. « Lorsque la Française des jeux crée un nouveau jeu, elle a l'autorisation en trois semaines », s'emporte Stéphane Jilquin. « Nous, pour le jeu la Bataille, il nous a fallu un an et demi. Le casino a encore mauvaise réputation. » François Bletel insiste : « On ne demande pas l'identité pour les jeux en ligne, au tabac pour les jeux, au PMU... » « Et pourtant on y voit des gamins de 15 ans et 1,50 m » abonde Stéphane Gilquin.
Les villes toussent
Quand les casinos s'enrhument, les villes auxquelles ils versent jusqu'à 15 % de leur produit brut des jeux toussent. Philippe Augier, maire de Deauville, l'a constaté : « Cette année, le casino de Deauville a un peu enraillé sa baisse. Mais c'est tout de même -30 % cumulés depuis 2007 ! La ville a reçu 5,8 millions d'euros du casino en 2013 contre 8,2 millions au plus fort de son activité. C'est un élément majeur de notre force d'investissement. Nous avons dû différer notre pôle culturel. »
« Attirer une nouvelle clientèle »
Trois questions à Bruno Cagnon, directeur général des opérations du groupe Lucien Barrière.
Quels sont les résultats pour l'année 2013 des casinos de Deauville et Trouville ?
En 7 ans, avec l'arrêt du tabac dans les lieux publics et le contrôle aux entrées nous avons perdu un tiers de notre business. 2013 a été une nouvelle année difficile. Pour la première fois, la baisse est ressentie auprès des jeux en ligne et de la Française des jeux. Dans ce contexte, Deauville gagne 1,68 % en 2013, et Trouville perd 6,5 %. La moyenne nationale étant une perte un peu supérieure à 4 %.
Comment s'expliquent ces résultats ?
Nous avons une autorité de tutelle lente à la décision. À Deauville, nous avons dû fermer l'« Ultimate poker » que nous avions en test depuis un an... Nous voudrions avoir l'opportunité d'offrir davantage de nouveautés à notre clientèle, elle est attente de cela. Pourquoi pensez-vous que la Française des jeux innove !
Nous souffrons également de la crise, moins de pouvoir d'achat, on rogne sur les loisirs. Deauville résiste mieux car nous avions une nouvelle offre de machines à sous.
Que faire alors pour attirer de nouveaux clients ?
La roulette anglaise électronique est arrivée au casino de Trouville depuis le 23 janvier, nous y avons également étoffé l'offre culturelle et la restauration. Car même si le coeur du réacteur ce sont les jeux, proposer d'autres activités permet d'attirer une nouvelle clientèle dans nos établissements.
Cinquième place
Avec 13 établissements, la Basse-Normandie est la cinquième région française pour le nombre de casinos : huit dans le Calvados, quatre dans la Manche et un dans l'Orne. Le groupe Barrière exploite Deauville, Trouville et Ouistreham ; Partouche, Cabourg et Agon ; Tranchant, Luc et Villers ; Joa, saint-aubin et Saint-Pair ; Viking, Houlgate ; Émeraude, Bagnoles et Cogit, Cherbourg. Granville est indépendant.
(source : ouest-france.fr/Xavier ORIOT et Corinne PRINTEMPS)