Les vingt-cinq employés, embauchés au casino du lac de la Magdeleine, resteront sur le carreau si l'établissement n'est pas autorisé à ouvrir.
Les jeux sont presque faits. Le 25 mars, si le ministère de l'Intérieur n'a pas bougé, le casino du lac de la Magdeleine, qui n'a jamais ouvert ses portes, devra définitivement les fermer. Ses employés sont suspendus à l'ultime échéance d'un recours gracieux. Arrivés en juillet 2004 pour une ouverture qu'ils croyaient imminente, ils se retrouveront sans rien, victimes selon eux d'une guerre des casinos qui leur échappe. L'édifice blanc, de style andalou, a été construit au milieu des pins, sur la route qui conduit de bordeaux à Arcachon. Les travaux ont été bouclés en mai 2004, deux ans après que le projet présenté par la société foncière Socodem a remporté l'appel d'offres de la ville de Gujan-Mestras, contre les groupes Partouche et Accor. «On savait que les grands groupes feraient tout pour nous mettre des bâtons dans les roues, explique Sentob Toledano, directeur général de la Socodem. On a tout fait de façon impeccable.»
<b>Grain de sable.b> Restait à obtenir l'autorisation du ministère de l'Intérieur. Dans un rapport, le préfet estime que «rien ne s'oppose à l'ouverture du casino». Rien, sauf la Commission des jeux. En juin 2004, elle reporte l'examen du dossier. Certains y voient déjà la patte de Partouche, propriétaire de deux casinos, l'un à Arcachon (à 12 km), l'autre à Andernos (à 30 km), pas forcément mécontents de passer l'été sans concurrence. En octobre, le dossier enfin présenté ne convainc pas la commission dont l'avis consultatif de refus est suivi par le ministre de l'Intérieur en janvier 2005. Motif: l'état du marché ne permet pas l'ouverture, deux casinos étant déjà présents autour du bassin d'Arcachon (groupe Partouche) en plus du casino de bordeaux (Accor). Ce dernier a pourtant obtenu en juin 2004 une augmentation de cinquante machines à sous pour son parc, preuve que le potentiel existe dans la région. Alain Paris, PDG de la Socodem, estime pourtant que ce département est l'un des moins bien dotés de la façade atlantique avec une machine à sous pour 2 300 habitants contre, par exemple, une pour 1 320 habitants dans les Pyrénées-Atlantiques.
Les employés, débauchés de casinos de toute la France, n'arrivent pas non plus à y croire. Ils citent «un paquet de zones côtières où les casinos sont bien plus rapprochés que ça», avec «même parfois deux casinos par ville, comme au Touquet». Au ministère de l'Intérieur, on justifie la décision par le fait que les deux casinos Partouche n'auraient «pas encore atteint le rendement de la moyenne nationale des casinos». Mais pour l'avocat de la Socodem, William Golnadel, qui a saisi le Conseil de la concurrence, «la commission n'a pas à statuer sur la concurrence, mais uniquement sur des questions d'ordre public».
<b>Collectif.b> Pour faire pression sur le ministère, un collectif des vingt-cinq employés du groupe s'est constitué. «On se bat au milieu d'une magouille politique», explique Pauline (1). Tous les employés sont dans des situations délicates. Ils ont plaqué leur job pour venir ici, ont loué des <b style='color:black;background-color:#ffff66'>maisonsb> qu'ils ne peuvent plus payer. «Je vis seule avec ma fille, je touche 1200 euros d'Assedic et paye 900 euros de loyer», explique Pauline. «On nous dit qu'on s'est engagés à la légère, mais ce n'est pas vrai. On savait que les exploitants, déjà propriétaires d'un casino dans le Tarn, n'étaient pas des voyous.» Certaines employées ont signé des CDD de caissière, d'autres sont retournées chez leurs parents dans leur région d'origine. Mais pour tous ceux qui ont scolarisé leur enfant ici, partir est impossible. Alors ils attendent la réponse du ministère.
(1) Le prénom a été changé.
(source : li
beration.fr/Michaël HAJDEN
bERG)