Un homme d'affaires français est sur le point de racheter le paquebot mythique pour l'amarrer à Honfleur et en faire un complexe hôtelier.
Il était moins une. L'ex-France, devenu Norway en 1979, a failli ne jamais revenir à la maison. Le paquebot était prêt à partir pour Amsterdam quand la solution hexagonale a hier marqué un point décisif. Depuis l'explosion d'une chaudière en mai 2003 à Miami, le paquebot était désarmé. Il avait été mis en vente en mars. Parmi les candidats au rachat : un Néerlandais, deux Américains, un Américano-Norvégien, un Coréen et un Français, Isaac Dahan. Son rêve : amarrer au pied du pont de Normandie un bateau transformé en complexe hôtelier haut de gamme, «avec des boutiques, des salles de congrès et de la thalasso».
Flou. Dahan a un atout énorme : la «sympathie pour l'histoire française de ce paquebot», selon les mots du propriétaire, star Cruise. Et un handicap tout aussi considérable : à force de rester dans le flou sur ses intentions, il peine à convaincre des collectivités locales d'accueillir l'ex-fleuron des mers. Mais le maintien du Norway à quai, dans le chantier allemand de Bremerhaven, coûte 500 000 dollars par mois à star Cruise. L'armateur s'impatiente et lance un ultimatum : le paquebot est acquis au Néerlandais, sauf «si le Français Isaac Dahan se manifeste avant le 10 octobre».
Hier, Cyrille Schott, le préfet de Basse-Normandie, a donc présidé cinq heures de négociations de la dernière chance. Devant les représentants de l'Etat, des collectivités locales, de la CCI et du port autonome, Dahan s'est livré à une présentation. Il a garanti la pérennité de son projet, soutenu par la Société générale, le Crédit agricole et le Crédit Lyonnais. Et promis «800 emplois directs et 500 indirects». «Ce projet est une bouffée d'oxygène pour l'économie», s'est réjoui Michel Lamarre, le maire de Honfleur, avant d'ajouter : «Quelle merveille pour tous les nostalgiques des années 60 !» Et les participants d'exprimer «un engagement de principe».
Nouveau quai. Hier après-midi, dans la voiture qui le ramenait à Paris, Dahan signait «des contrats à la pelle presque sans les lire». Il était le roi du monde : «Le groupe Barrière s'est montré intéressé par de l'hôtellerie quatre étoiles, et Partouche ne cracherait pas sur un casino si les autorités nous le permettaient !» Une fois l'acte de vente signé 20 millions d'euros , l'ancien transatlantique sera rapatrié à Cherbourg, où l'attendent dix-huit mois de travaux de réaménagement.
Pendant ce temps, Honfleur réalisera un nouveau quai, des places de stationnement et un système d'assainissement d'eau. Soit, selon nos informations, une enveloppe de 17 millions d'euros à répartir entre les intervenants publics. En contrepartie, Dahan devra s'acquitter de frais de parking et d'une redevance de 280 000 euros par an pour l'occupation du quai. Il lui restera à négocier l'octroi d'une licence auprès de la compagnie CMA-CGM, propriétaire du nom France. Pour faire mentir la chanson.
(source :liberation.fr/Mathieu DESLANDES)