Le tribunal de Tarbes a condamné un Belge de 45 ans après que lui et son présumé complice, décédé depuis, ont fait chanter l’héritière de l’ancien propriétaire du casino de capvern (Hautes-Pyrénées) pour lui extorquer plus de 60 000 euros.
L’histoire est digne d’un scénario de film de mafieux. Elle s’est pourtant déroulée en Bigorre, entre les murs feutrés du casino de capvern.
À la mort de l'ancien propriétaire des lieux en 2013, la fille de ce dernier est loin de se douter qu’en plus d’hériter de la gérance de la salle de jeux, elle va devoir faire face aux fréquentations douteuses de son père et aux pactes obscurs qu’il a scellés avec elles. Son cercueil à peine en terre, la messe est dite pour l'héritière en deuil qui ignore qu’elle est déjà la proie de vautours venus assister aux obsèques. Pendant 4 ans, elle va être victime d’un chantage savamment orchestré et dans lequel elle va perdre plus de 60?000 euros.
Un ami qui vous veut du bien
Le volet judiciaire de cette affaire débute en 2016 lorsque l’héritière essorée décide de déposer plainte en gendarmerie. Aux enquêteurs, elle raconte son calvaire et ses nuits d’angoisse après qu’elle pense avoir été manipulée par un soi-disant ami de la famille?: un certain Mike.
Le même qui a effectué plusieurs menus travaux dans le casino du temps de son père et qui a refait surface à sa mort. Le même qui l’a prise sous son aile le jour des obsèques pour la mettre en garde contre les vautours. Le même encore qui est soupçonné d’avoir tout manigancé et qui ne sera jamais jugé parce qu’il a récemment succombé à un cancer.
Un mois après le décès de son père, l’héritière a pris peur lorsqu’elle a écouté plusieurs messages vocaux menaçants laissés par un certain Jean-Claude sur la boîte vocale de son père défunt. "Tu ne m’as pas payé l’enveloppe comme convenu. Tu veux quoi?? Que d’autres maisons brûlent?? Je m’en fous que tu sois malade." Des menaces réitérées plusieurs jours d’affilée jusqu’à ce que l’inquiétant Jean-Claude finisse par réclamer son dû directement à l’héritière.
Cette dernière se souvient alors que l’une des maisons de son père a effectivement été détruite par un incendie en 2003. Désormais, le maître chanteur menace de brûler la sienne. Mais qui est ce Jean-Claude?? C’est Mike qui va lui répondre?: c’est un homme qu’il connaît bien, qui n’a pas la réputation de plaisanter, et à qui son père devait plus de 50?000 euros.
Mike conseille à l’héritière de s’exécuter si elle veut la paix. Mais voilà, la femme n’a pas cette somme en sa possession. Sous pression, elle consent à verser plusieurs milliers d’euros avec le chéquier du casino. Pas assez pour calmer Jean-Claude selon Mike qui vole une fois de plus au secours de l’héritière. Il avancera la dette et elle devra lui rembourser. Pour ce faire, l’héritière emprunte 30?000 euros à sa mère.
Une commission envolée
Les investigations menées par la gendarmerie ont finalement démontré que derrière le dangereux Jean-Claude, se cachait en réalité un certain Mahdi D. Un Belge de 45 ans surnommé «?Le blond?», ancien agent immobilier étroitement surveillé par les forces de l’ordre en raison de ses activités douteuses, et seul à être jugé (en son absence) par le tribunal de Tarbes la semaine dernière pour extorsion par violence, menace ou contrainte.
"?Mike devait 10?000 euros à Mahdi D.?" a rapporté la présidente du tribunal. "?Mike a donc demandé à Mahdi D. de passer les appels menaçants à la victime en se faisant passer pour Jean-Claude. Ainsi Mike récupérait les sommes versées par la victime à son compte et pouvait rembourser sa dette auprès de Mahdi D." Un plan machiavélique né d’une terrible frustration.
Avant sa mort, le propriétaire du casino était sur le point de vendre son bien à un acquéreur rencontré par l'intermédiaire de Mike. "?L’acheteur avait promis de verser une commission de 300?000 euros à Mike à la signature?" a précisé la présidente.
Mais voilà, le propriétaire est décédé avant la signature et Mike endetté ne pouvait plus se refaire. "C’est un projet de crapules. L’un menace, l’autre récolte. Mike le protecteur a donné le baiser de la mort à ma cliente" s’est offusqué l'avocat de l'héritière Fabien Romey (cabinet Sagardoytho & Marco/ Barreau de Pau).
Si le tribunal a regretté que la tête pensante de cette extorsion ne soit plus de ce monde pour répondre de ses actes, son comparse Mahdi D. a été condamné à 12 mois de prison ferme. Il devra rembourser 30?000 euros à l’héritière flouée au titre du préjudice matériel.
Cette dernière n’est plus propriétaire des lieux, cédés pour 1 euro symbolique contre son gré selon ses dires au sortir de l’audience.
(source : ladepeche.fr/Sophie Loncan)