L’établissement de jeux pourrait reverser plus de 1,65 million d’euros de taxes par an aux collectivités locales. C’est le syndicat d’aménagement du der qui en sera le premier bénéficiaire.
«I l y a beaucoup de mes collègues maires qui nous envient un peu car ils pensent que l’on va toucher le jackpot. On aura quelques retombées, mais c’est plutôt du beurre dans les épinards. » Jean-Pierre Calabrèse, le maire de Giffaumont-Champaubert, commune sur laquelle est implanté le casino, veut casser le mythe. Son village de 260 habitants, dont le budget s’élève 400 000 euros, ne va pas changer son train de vie. En tant qu’hôte du casino, il percevra 5 % de la taxe sur le produit brut des jeux (PBJ). « Cela va compenser la baisse de la dotation de l’État, selon l’élu, qui estime cette nouvelle rentrée fiscale à environ 15 000 euros par an pour les premières années d’exercice. Elle pourrait doubler et atteindre 30 000 à 40 000 euros si les résultats sont conformes aux prévisions du groupe Joa, qui espère 300 000 visiteurs par an dans son casino.
Des taxes progressives, en fonction des résultats
En réalité, en touchant les 95 % restants de la taxe sur le PBJ, le Syndicat d’aménagement touristique du lac du der, présidé par le député Charles de Courson, sera le premier bénéficiaire des impôts sur l’établissement de jeu.
Cette taxe est plafonnée par la loi à 15 % du PBJ, mais elle peut être inférieure, selon l’accord entre la collectivité et le délégataire exploitant du casino. « Nous avons opté pour un taux progressif, afin de favoriser le démarrage, explique Charles de Courson. Cela se fait couramment. » Ainsi, la taxe sera de 7 % du PBJ, si ce dernier est inférieur à 3,2 millions d’euros, 12 % s’il est inférieur à 7,5 millions, puis 15 % au-delà. Selon ses prévisions, inscrites dans le dossier d’autorisation d’exploiter, Joa vise un PBJ de 5,5 millions d’euros la première année et de 11 millions d’ici 2019. Au début, cela représenterait une manne de 385 000 euros, à partager entre le syndicat (95 %) et la commune de Giffaumont (5 %) ; puis 1,65 million d’euros (15 % de 11 millions), si Joa atteint ses objectifs.
« Ce sera une bonne nouvelle si on arrive à verser ces montants-là », glisse Laurent Jourdain, directeur des jeux du groupe Joa et président du casino du der, qui rappelle que ces chiffres sont « théoriques. O n est un secteur d’activité extrêmement prélevé. Globalement, entre 50 et 60 % du PBJ d’un casino reviennent à l’État et aux collectivités », estime le cadre. Pour autant, Laurent Jourdain ne semble pas s’en plaindre : « Les reversements à la commune et au syndicat permettent de contribuer à la dynamique de la station nautique de Giffaumont. Les projets de développement, tels que la nouvelle Maison du lac, vont bénéficier à l’ensemble des acteurs touristiques, nous compris. »
En effet, la petite cagnotte de Giffaumont sera utilisée exclusivement dans le but d’augmenter « l’attractivité du village. On se doit d’avoir un certain cachet pour les touristes », considère Jean-Pierre Calabrèse. Ce dernier imagine, par exemple, « une liaison piétonne qui relierait la station nautique au cœur du village, sans passer par les digues ». Il réfléchit aussi à installer « des curiosités de type land-art » dans le parc botanique, et à « réhabiliter le vieux cimetière ».
Une manne qui servira d’abord à rembourser des emprunts
Le Syndicat du der, lui, affectera, la totalité de la taxe sur le PBJ au remboursement des emprunts contractés pour l’aménagement de la station. « Les équipements publics et l’achat de terrains nous ont coûté 10,5 millions d’euros et nous avons reçu 2,5 millions de subventions, rappelle Charles de Courson. Environ 10 % de ces travaux étaient liés au casino (notamment des déplacements de réseaux). Selon la vitesse de la montée en charge de cette taxe, nous rembourserons plus ou moins vite. Après, cela permettra de réaliser d’autres projets sur le lac », poursuit le président du syndicat, dont le mandat se termine en avril prochain.
Finalement, la seule à ne pas avoir vraiment réfléchi à tout cela, c’est Pascale Chevallot, présidente de la communauté de communes Perthois Bocage et der, qui touchera la cotisation foncière des entreprises et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), remplaçantes de la taxe professionnelle. « Jusque-là, on a eu d’autres chats à fouetter. Cela va nous donner un peu plus d’oxygène si cela fonctionne bien, mais nous n’avons pas fait d’estimation », indique l’élue, dont la jeune intercommunalité doit assumer de nombreuses compétences. Au-delà des retombées fiscales, Thierry Cherrière, directeur du Syndicat du der, met en avant les 55 emplois créés par l’établissement, la sollicitation de fournisseurs locaux pour l’entretien, les boissons et la nourriture, et l’installation probable de nouveaux habitants dans le secteur. « Deux personnes du village vont travailler au casino et deux autres sont venues en mairie se renseigner sur des locations, illustre Jean-Pierre Calabrèse. J’imagine qu’il y en aura d’autres. » La commune, dont la population fluctue de 260 à 1 500 en fonction des saisons, accueillera bien volontiers ces Giffaumontais à plein-temps.
Le syndicat, futur propriétaire du bâtiment
En plus de la taxe sur le produit brut des jeux, Joa versera au Syndicat du der un loyer de 40 000 euros par an, pour la location de l’emprise foncière du casino. De plus, selon les termes du bail emphytéotique d’une durée de 20 ans, le bâtiment deviendra propriété du Syndicat dans 19 ans. L’exploitant de l’établissement de jeu deviendra alors locataire des locaux, dont la construction a coûté 7,5 millions au groupe Joa. « Cela montre que ce n’est pas la collectivité qui a payé pour le casino. Au contraire, cela enrichit notre patrimoine » se félicite, Thierry Cherrière.
(source : lunion.presse.fr/Rémi HAVYARIMANA)