Le service d’addictologie de l’hôpital Paul Brousse (Villejuif) développe une unité spécialisée dans les jeux de hasard et d’argent. Le Dr Amandine Luquiens nous explique la prise en charge des joueurs pathologiques.
L’addiction aux jeux de hasard et d’argent est une véritable maladie. Au niveau neurobiologique, elle met en jeu les mêmes mécanismes du circuit de la récompense que l’addiction à des produits comme l’alcool, le tabac, ou autres.
Travailler sur les pensées erronées
Au cours de la prise en charge, on va travailler sur les pensées erronées qui entretiennent ces comportements de jeu. Par exemple, l’idée de "se refaire". Pour la personne, la seule solution pour compenser la perte financière serait de continuer à jouer pour gagner le gros lot.
On travaille aussi sur l’illusion de contrôle. Beaucoup de joueurs ont l’impression que leur part d’action sur le résultat du jeu est plus forte que celle du hasard. Une idée fausse puisqu’en réalité, c’est toujours le hasard qui décide. Autre exemple de pensées erronées : les chiffres fétiches.
Nous allons donc aider le joueur à identifier ces distorsions, à comprendre comment elles surviennent et à repérer de quelles émotions elles sont accompagnées. Cela va lui permettre de savoir quand et comment son cerveau lui envoie de faux messages. Il va falloir, ensuite, lui réapprendre à annuler ces pensées par des techniques de thérapie cognitivo-comportementale. Des exercices vont l’aider à trouver les bonnes stratégies.
Ces exercices peuvent se faire en consultation, puis lors d’expériences de jeu, chez soi, et sans miser de l’argent pour qu’il n’y ait pas de conséquences financières.
La thérapie cognitivo-comportementale est effficace
La durée de cette thérapie est très variable. Tout dépend du degré de gravité du trouble. Une chose est sûre, cette technique a fait la preuve de son efficacité. Aucun médicament n’a, pour l’instant, d’autorisation de mise sur le marché dans l’indication "jeu pathologique".
Mais certaines molécules ont montré une efficacité au moins partielle, notamment la naltrexone. Ce produit semble intéressant chez les personnes qui présentent à la fois un problème de dépendance au jeu et à l’alcool. Mais on ne le prescrit qu’au cas par cas, après avoir pesé le pour et le contre avec le patient.
Nous proposons aussi à tous les joueurs un bilan financier et un accompagnement par une assistante sociale.
Malheureusement, le recours aux soins est souvent tardif. Les joueurs nous consultent lorsqu’ils subissent des conséquences financières parfois catastrophiques. Nous recommandons, au contraire, de venir le plus tôt possible : dès que le jeu prend trop de temps, au point d’abandonner d’autres activités.
Des adresses et plus d’infos sur : www.joueurs-info-service.fr
(source : santemagazine.fr/Dr Amandine Luquiens)