La principauté de Monaco qui s'estime caricaturée en paradis de la fiscalité et du blanchiment, déploie les grands moyens pour changer d'image, campagne de communication et vote d'une loi refondant son dispositif de lutte contre l'argent sale à l'appui.
Illustration de cette quête de respectabilité: l'annonce, en l'espace d'une semaine, du lancement d'une importante campagne destinée à tordre le coup aux clichés, suivie du vote d'une loi refondant la lutte contre le blanchiment.
Le 24 juillet, lors du débat sur le nouvel arsenal anti-blanchiment, Stéphane Valéri, le président du Parlement monégasque s'est indigné d'avoir vu, ces derniers mois, la principauté "injustement attaquée et vilipendée". "On a construit de toutes pièces le bouc émissaire idéal (...)", s'est-il ému.
"Des préjugés conçus pour détourner les opinions publiques de la triste réalité de crise", a critiqué sa collègue de la majorité, Anne Poyard Vatrican.
Les responsables monégasques estiment que certaines réalités de la principauté sont méconnues: que les recettes de l'Etat proviennent à 60 % des taxes, que la principauté applique les règles européennes concernant la TVA, les droits de douane, la fiscalité de l'épargne des non-résidents et qu'elle a mis en place dès 1993 un dispositif anti-blanchiment élaboré.
Moneyval, l'organisme de lutte contre le blanchiment du Conseil de l'Europe, avait d'ailleurs accordé à la principauté un "satisfecit" sur ce point dans son dernier rapport de décembre 2007, préconisant essentiellement des ajustements.
Des arguments que la campagne de communication qui vient d'être confiée à trois pointures françaises du secteur, afin de "dessiner l'image de Monaco pour les dix ans à venir", se fera sans doute fort de mettre en avant.
Cette image sera déterminante pour continuer à attirer des capitaux lorsque la principauté appliquera les règles de transparence fiscale préconisée par l'OCDE, observe un membre de l'administration monégasque.
Reste à vérifier, derrière cette offensive de charme, la réalité des intentions de la principauté où la pression d'un certain nombre de responsables politiques et économiques est forte pour ne pas "accepter en courbant l'échine les exigences de l'OCDE et des autres organisations internationales", selon les termes d'Anne Poyard Vatrican.
De fait, la nouvelle loi anti-blanchiment, tout en respectant les préconisations de Moneyval, a pris en compte tous les amendements des parlementaires qui souhaitaient des mesures de contrôle plus souples que celles inscrites dans le texte initial du gouvernement.
"Aujourd'hui la plupart des pays disposent de textes anti-blanchiment et le blanchiment n'a pas disparu. Ce qui compte c'est la mise en oeuvre: quel poids a la personne chargée des vérifications au sein d'un établissement financier, peut-elle imposer ses vues, de quels moyens dispose-t-elle ?", décrypte Thierry Godefroy, chercheur au CNRS, spécialiste du blanchiment.
"La même tension s'exerce au sein des casinos. Pousse-t-on vraiment à fond le contrôle d'un gros joueur ?" s'interroge-t-il.
Du côté des accords bilatéraux de transparence fiscale que Monaco négocie actuellement pour répondre aux exigences de l'OCDE, la principauté se bat pour n'échanger des renseignements fiscaux qu'au "cas par cas" et refuse ce qu'elle appelle "la pêche générale aux informations". Seuls deux accords ont été signés depuis le G20 d'avril, avec la belgique et le Luxembourg. Ces deux Etats ont pour leur part déjà signé les douze conventions requises par l'OCDE.
(source : la-croix.com/AFP)