Entretien avec Dominique Desseigne, président du conseil de surveillance
Le «Fouquet’s Barrière Marrakech» ouvrira ses portes en 2008. Une enseigne de prestige qui a choisi Marrakech pour sa première sortie à l’international en dehors de ses bases européennes et n’exclut pas d’autres développements au Maroc.
Les travaux de l’établissement dans la cité ocre ont été lancés le week-end dernier, après un retard de 5 ans. Dominique Desseigne, président du conseil de surveillance du groupe en explique les raisons et aussi la nouvelle configuration du projet qui réunit aujourd’hui un tour de table important (Lucien Barrière, CMKD, CFG, Axa et RMA Watanya)
· L’Economiste: Vous avez annoncé le projet de Marrakech en 2002 et ce n’est qu’en 2007 que vous donnez le 1er coup de pioche. Qu’est-ce qui a retardé le projet?
- Dominique Desseigne: Je voudrais d’abord souligner que l’implantation du groupe au Maroc n’est pas anodine et est le fruit d’une réflexion et d’un travail de plus de cinq ans.
Tout est parti d’une volonté d’aller vers une ville, Marrakech en l’occurrence, et de saisir une opportunité pour monter un investissement d’un hôtel de luxe sur un terrain dans la médina.
En 2001, le groupe s’était positionné sur ce terrain en association avec d’autres promoteurs dont Jean Pierre Lamic.
Le groupe Barrière devait être actionnaire à hauteur de 35% et avoir le contrat de management. Finalement, nos deux anciens partenaires ne pouvaient pas s’engager sur les fonds nécessaires pour l’investissement (ndlr: 480 millions de DH) et donc il fallait reconfigurer le projet. Ceci étant, il y a eu aussi quelques erreurs de jugement que nous avons pu rectifier entre-temps.
· Lesquelles?
- Il fallait revoir nos ambitions. Tel qu’il a été pensé en 2002, le projet comportait un hôtel de luxe de 150 chambres en plus des espaces de loisirs.
Or, en raison du prix du foncier, l’équation économique ne correspondait pas. D’où l’intégration de la composante ryads-villas de 200 à 400 m2 avec des piscines privatives…
Le nombre de chambres de l’hôtel a été ramené à 86 suites. Nous avons gardé les mêmes espaces pour les loisirs (spa, Kid’s club) et le Fouquet’s.
· C’est un concept d’hôtel de luxe adossé à un projet immobilier, une nouveauté pour votre groupe. Est-ce parce que c’est à la mode ou est-ce une nouvelle orientation du groupe?
- Ce n’est pas vraiment une nouveauté pour le groupe. Historiquement, le fondateur du groupe s’est appuyé sur la promotion immobilière pour développer les espaces de loisirs comme les golfs.
Pour le projet de Marrakech, la composante immobilière existe, mais pas du point de vue classique… Le groupe Lucien Barrière assure la gestion locative des ryads qui seront gérés comme des chambres et sous contrôle du personnel de l’établissement.
Le room service, les espaces de l’hôtel font partie des prestations proposées. Ce qui nous ramène à 250 chambres au total qui incluent les suites de l’hôtel et les chambres des villas.
Une des grandes caractéristiques du projet de Marrakech est cet équilibre que nous avons voulu pour les quatre produits qui se complètent: l’établissement, les ryads, le spa et le restaurant Fouquet’s.
· Entre 2002 et 2007, le montage du projet a changé et aujourd’hui, vous avez à vos côtés une pléiade d’actionnaires: CFG, CMKD, Axa, RMA Wataniya. Etait-il difficile de réunir un tour de table pareil?
- C’est le CFG qui a monté ce tour de table. Et pour lui, ce fut l’un des placements les plus faciles à réaliser et pour lequel il y a eu très peu de discussions.
Dans ce tour de table, nous sommes actionnaire principal à 35%. Les 65% restants sont partagés à parts égales entre les 4 autres actionnaires.
Lucien Barrière a un contrat de management avec Ryad Resort développement, promoteur du projet.
· Quels en sont les termes?
- Les termes habituels selon les conditions du marché. N’oubliez pas que le groupe Barrière est actionnaire principal de ce projet. Il est donc responsable au même titre que les autres actionnaires de la bonne marche du projet.
· Marrakech est votre premier investissement hors Europe. Le Caire est aussi en projet. Qu’est-ce qui justifie cet intérêt pour des pays arabes, notamment comme le Maroc?
- Il s’agit de profiter des opportunités de développement. Le Maroc est un pays très courtisé par les investisseurs touristiques.
Nous ne pouvions rester en dehors du circuit. Aujourd’hui, nous avons lancé notre projet. Nous avons même trouvé des acquéreurs pour les 30 ryads.
Par ailleurs, le groupe et son enseigne le Fouquet’s sont étroitement liés au monde du cinéma avec le festival de cannes, celui de Deauville, le festival du film britannique de Dinard. On espère l’être aussi avec le festival de films de Marrakech.
· Justement, votre groupe, plus connu par ses casinos que ses hôtels en dehors de celui de Cannes, serait-il intéressé par un développement dans ce secteur au Maroc?
- Pourquoi pas. Nous suivrons le marché notamment dans les villes marocaines qui bougent le plus. Je vous rappelle que toute opportunité est bonne à saisir.
· Enfin, qu’est-ce qu’a pu changer l’entrée d’accor et Colony dans le capital de Lucien Barrière?
- Nous avons doublé de taille en intégrant les établissements d’accor casinos, en plus du cash flow, qui reste le nerf de la guerre.
Nous avons restructuré le management et nous développons rapidement le concept en France avec le dernier hôtel Fouquet’s Barrière à Paris et à l’international.
Le groupe Barrière conserve la majorité et nous sommes aujourd’hui numéro 1 en Europe.
1,9 milliard d’euros
C’est sur 22.000 m2 que le groupe Lucien Barrière va monter son méga-complexe pour un investissement de 450 millions de DH financé à hauteur de 180 millions par la Banque centrale populaire (BCP) et la Banque populaire Marrakech-Béni Mellal.
Les travaux ont été lancés officiellement vendredi dernier en présence de l’ensemble des actionnaires ainsi que du ministre du Tourisme, Adil Douiri, et des autorités de la ville de Marrakech.
Rappelons que le groupe Lucien Barrière hôtels et casinos, détenu à 51% par la famille Desseigne-Barrière, a dans son portefeuille aujourd’hui 15 hôtels de luxe, 37 casinos et 90 restaurants. Son dernier-né est l’hôtel Fouquet’s Barrière Paris.
Le groupe a réalisé un volume d’affaires à fin 2006 de 1,9 milliard d’euros dont 950 millions d’euros pour le produit des jeux. Le groupe a terminé l’année avec près de 500.000 nuitées pour ses établissement et plus de 2,3 millions de couverts.
(source : leconomiste.com/Propos recueillis par
Badra BERRISSOULE)