Le Casino du Liban, une des plus grande entreprises du pays et le plus grand casino de la région, a dégagé entre 27 et 30 millions de dollars de bénéfices en 2005, affirme son président, Élie Ghorayeb. Ce chiffre est en augmentation d’une centaine de milliers de dollars par rapport à 2004, ajoute-t-il. Un exploit placé dans le contexte politique difficile de l’année dernière, même s’il reste loin des 10 % de croissance des années précédentes.
Certes, M. Ghorayeb dit avoir noté une « baisse certaine de la clientèle syrienne qui, avec la jordanienne, représentait habituellement la moitié de la clientèle étrangère », mais cela n’a pas affecté l’activité, car les autres ont été fidèles, notamment les clients libanais qui représentent près de 60 % des visiteurs. Et pour preuve, selon lui, les 600 places de la salle des fêtes ont, cette année encore, été entièrement occupées pour la soirée du 31 janvier.
M. Ghorayeb va même plus loin en affirmant que les bénéfices de la période des fêtes ont augmenté de près de 15 % par rapport à la même période de l’année dernière.
Concernant le chiffre d’affaires du Casino, M. Ghorayeb parle de près de 200 à 250 000 dollars par nuit, soit 110 millions de dollars par an, 90 millions provenant des jeux et 10 à 15 millions des activités annexes, telles que la restauration et les spectacles.
« Sur cette somme, 15 millions ont été reversés sous forme de dividendes aux actionnaires de l’entreprise », précise-t-il. Car, rappelons le, 48 % du capital du Casino du Liban est constitué d’actions au porteur. Parmi les principaux bénéficiaires, on peut notamment citer la compagnie Abela, qui en détiendrait environ 15 %, et la Bank Audi.
Les 52 % restants du capital sont détenus par la compagnie libanaise Intra. Cette dernière regroupe le gouvernement koweïtien, à 35 %, la Banque centrale, 35 %, le ministère des Finances, 10 %, le Qatar, 10 %, et des actionnaires libanais.
Contentieux avec l’État
Au Casino, l’État joue un triple rôle. D’abord en tant que collecteur d’impôts. Selon son président, le Casino aurait payé 100 millions de dollars d’impôts ces six dernières années. Puis en tant qu’actionnaire, il touche une part des dividendes. Enfin, « une part des revenus, 35 millions de dollars par an, est reversée à l’État », affirme M. Ghorayeb.
En effet, en échange du monopole accordé par l’État au Casino du Liban, le ministère des Finances ponctionne 30 % des revenus du Casino, une part qui augmente tous les dix ans et devrait atteindre 40 % fin 2006, selon le contrat signé entre les deux parties en 1996. Mais sur ce point, M. Ghorayeb est en conflit avec le ministère depuis des années.
Le président du Casino estime que les machines à sous, notamment les « Video Poker », n’entrent pas dans le cadre de cet accord, car le Casino ne détient pas l’exclusivité d’exploitation de ces machines. Il a donc porté plainte devant le Conseil d’État, mais ce dernier l’a débouté à trois reprises. Car si d’autres établissements libanais possèdent des machines à sous, elles sont assorties de conditions restrictives (horaires, gain maximum…) qui ne sont pas imposées au Casino. Mais le Casino rechigne toujours à débourser les sommes dues qui se sont élevées à plus de 66 milliards de livres libanaises, soit près de 44 millions de dollars en 2005, selon des chiffres du ministère des Finances. En tout, l’État réclame plus de 340 milliards de livres libanaises, plus de 226 millions de dollars, accumulés ces neuf dernières années. Et cela sans compter les indemnités de retard de paiement qui, selon le contrat, s’élèvent à 1 % par jour. L’État a cependant longtemps fermé les yeux sur ces sommes, « et il s’est subitement mis à me les réclamer », souligne M. Ghorayeb. C’est pour cela qu’une source proche du dossier estime que le ministère serait prêt à négocier les pénalités si le Casino acceptait simplement de rembourser les sommes dues.
En revanche, le Casino a bien versé 15 millions de dollars de pénalités pour ne pas avoir construit un hôtel comme stipulé dans le contrat. Une condition imposée par l’État pour développer l’activité touristique dans la région. Pour M. Ghorayeb, des « problèmes d’ordre juridique » l’auraient empêché de le faire. Selon certaines sources dignes de foi, la proximité de plusieurs hôtels dans la région serait à l’origine de ce manquement.
« Caisse noire »
Quant aux accusations concernant la présence d’une « caisse noire » au Casino, récemment évoquée en Conseil des ministres, M. Ghorayeb les nie en bloc. « Il n’y a jamais eu de mainmise syrienne sur le Casino », a-t-il ensuite précisé. « D’ailleurs, il y a cinquante contrôleurs du ministère des Finances et un cabinet d’audit qui supervise les comptes », affirme M. Ghorayeb. Cependant, les contrôleurs n’ont eu accès à toutes les salles de jeux que depuis près de six mois. Avant cela, dans le cadre du contentieux avec l’État, les machines à sous leur étaient interdites. M. Ghorayeb nie également les accusations d’emplois fictifs au Casino. « À mon arrivée, j’ai réduit le nombre d’employés de 1 350 à 1 060 aujourd’hui. En réalité, nous aurions besoin de près de 1 200 employés, mais j’ai réussi à former une bonne équipe de direction », a-t-il expliqué. Enfin, M. Ghorayeb affirme que la présence d’usuriers, les « moneylenders », à l’intérieur du Casino est de l’histoire ancienne, depuis que les forces de l’ordre les ont interpellés il y a près de trois ans. « Le Casino du Liban est une entreprise complètement transparente », a conclu M. Ghorayeb.
(source : lorie
nt-lejour.com.lb/Sahar AL-ATTAR)