PARIS (AP) - En France, 5% des joueurs sont des ludopathes, ou joueurs pathologiques, estime le Dr Jean-Claude Matysiak, chef de service de la consultation d'addictologie à l'hôpital de Villeneuve-Saint-Georges (Val de Marne) dans un entretien téléphonique accordé jeudi à l'Associated Press.
"On ne parle de joueur pathologique qu'à partir du moment où il y a souffrance", note-t-il, en faisant la distinction entre malade et joueur professionnel.
Le ministère de l'Intérieur a signé jeudi avec les deux principaux syndicats d'exploitants de casinos un protocole qui "prend en compte les impératifs de santé publique en matière de prévention de l'addiction au jeu".
"Un joueur professionnel de poker gagne sa vie de cette façon alors qu'un joueur pathologique, lui, il perd sa vie, c'est-à-dire qu'il commence à perdre ses relations amicales, il commence à avoir des difficultés dans sa vie familiale, amoureuse, mais aussi surtout dans sa vie professionnelle", explique le Dr Matysiak. "Sa première obsession quand il se lève, c'est le jeu".
Comme l'alcoolisme et l'héroïnomanie, cette pathologie touche davantage les hommes que les femmes. "Le rôle ou l'attrait de l'argent est souvent quelque chose de très masculin", avance l'addictologue.
"Un joueur d'argent est dans une maladie addictive, c'est-à-dire qu'en fait il cherche la solution de son problème dans le problème", explique-t-il encore. "Il joue pour se refaire, c'est une espèce de fuite en avant".
Un traitement est possible mais d'abord, "il faut que la personne ait envie de se soigner". "Comme les problèmes d'alcool, comme les problèmes de drogue, si la personne n'a pas conscience de son problème et ne veut pas s'arrêter, on ne peut quasiment rien faire pour elle", note le Dr Matysiak.
Une fois que le ludopathe demande de l'aide, des médicaments peuvent lui être prescrits, si besoin est. "La plupart des gens qui sont dans une conduite addictive sont un peu déprimés" et certains antidépresseurs "peuvent aider à atténuer les tendances compulsives".
"Et puis, si la personne est désemparée, n'arrive pas à s'arrêter, on peut même en arriver jusqu'à l'hospitalisation, un peu comme un sevrage pour un toxicomane", relève l'addictologue en insistant sur l'importance de la seconde phase du traitement, la psychothérapie.
"Il s'agit bien sûr de comprendre pourquoi la personne s'est engagée dans le jeu (...) pour qu'elle puisse s'en sortir mais surtout ne reproduise pas ses difficultés dans une autre addiction, c'est-à-dire qu'elle arrête de jouer et qu'elle devienne alcoolique par exemple. Ca, c'est un risque", prévient-il.
Il faut surtout que la personne reconnaisse qu'elle a un "rapport particulier" avec le jeu et "que ce rapport particulier existera toujours". "Le danger, pour les alcooliques comme pour les joueurs, c'est qu'au bout d'un certain temps d'abstinence, ils essaient de se prouver à eux-mêmes qu'ils sont plus forts" que leur abstinence et replongent. Pour le Dr Matysiak, "c'est un piège". AP
(source : yahoo.com/cb/mw)