Tout investisseur désireux de prendre une participation dans un casino français sera soumis à une autorisation préalable du ministère de l'économie au titre du décret, paru le 31 décembre 2005, protégeant les secteurs dits "stratégiques" du patrimoine économique français.
Les jeux d'argent sont la seule activité qui ne relève pas de la défense nationale, de la recherche ou de la sécurité à figurer dans cette liste de onze secteurs déclarés sensibles par le gouvernement. Le texte précise, à l'égard des casinos et des jeux d'argent en général, qu'il s'agit de veiller à prévenir les risques de blanchiment d'argent sale. Pour ce faire, le décret stipule que les "autorités administratives peuvent recourir à la coopération internationale pour vérifier l'exactitude des informations fournies par les investisseurs étrangers, notamment celles relatives à l'origine des fonds".
Ce dispositif réglementaire vient renforcer l'article du code monétaire et financier prévu par la loi du 9 mars 2004 qui assujettit déjà les professions liées aux jeux d'argent à l'obligation de déclaration de soupçon à l'organisme antiblanchiment français Tracfin.
"Même si l'univers des casinos s'est discipliné, il reste un creuset naturel pour d'éventuels comportements criminogènes. Ce texte complète l'arsenal en vigueur", estime-t-on au ministère de l'intérieur, chargé de contrôler l'activité des jeux en France.
Les casinos, comme les cercles de jeux ou les paris en ligne, sont concernés par ce nouveau texte qui, plaide-t-on au ministère de l'économie, ne change pas fondamentalement la donne existante. Les autorités ont ainsi déjà validé des opérations capitalistiques dans ce domaine, notamment lors de la cession du groupe de casinos Moliflor Loisirs, en novembre 2005, à la société de capital investissement Bridgepoint.
Néanmoins, précise un juriste, la différence se situe au niveau de l'article R. 153-10. Au début de celui-ci, il est désormais précisé que "le ministre chargé de l'économie refuse par décision motivée l'autorisation de l'investissement projeté". Cette motivation, ajoute ce juriste, permettra d'engager des recours contentieux.
Le marché des casinos, qui compte 190 établissements en France, a été, fin décembre, qualifié de morose pour la saison 2004-2005 par les professionnels du secteur. Ils ont réalisé un produit brut des jeux (PBJ, différence entre mises et gains) de 2,647 milliards d'euros, en hausse de 1,33 %, soit la croissance la plus faible depuis seize ans.
Ce bilan confirme le premier rang du casino d'enghien (Val-d'Oise). Mais la récession des jeux se fait sentir dans le "club des dix" premiers casinos dont huit d'entre eux ont enregistré une baisse de leur PBJ.
(source : lemonde.fr/François Bostnavaron et Jacques Follorou)