La montée en puissance des machines à sous dans les casinos jette dans l'ombre les jeux traditionnels comme la roulette, le stud poker ou encore le black jack. Le mode de rémunération des croupiers est victime de ce bouleversement. Ils seront en grève dès aujourd'hui à niederbronn-les-Bains.
L'image de joueurs richissimes lâchant, dans des volutes de fumées de cigares, des pourboires par-dessus la manche après d'interminables parties de stud poker ou de roulette anglaise, laisse penser que les croupiers gagnent très bien leur vie.
Salaires en baisse
Ce n'est plus vrai. Depuis l'irruption des machines à sous dans les casinos en 1988 puis la mise en place de l'euro et la stagnation de la situation économique, nombre de joueurs ont déserté les salles des jeux traditionnels. A niederbronn-les-Bains, un casino du groupe Lucien Barrière SAS, cette activité a enregistré une baisse de 30% ces dernières années.
Qui dit baisse de l'activité dit baisse des pourboires et donc baisse de la rémunération des croupiers. Le mode de rémunération des personnels des jeux de table repose en effet sur un système de coefficients qui permet de partager les pourboires. Une fois la clef de répartition calculée, le montant attribué à chaque personne est comparé à la grille nationale de revenu minimum.
Si le montant des pourboires partagés ne permet pas d'atteindre ce minimum, l'employeur met au bout. Dans le cas contraire, il ne verse rien, les pourboires suffisant à rémunérer le personnel. C'est souvent le cas à niederbronn, mais les salaires, jadis largement au-dessus du minimum garanti s'en rapprochent désormais.
« A une époque, il y avait tellement de pourboires que tout le casino vivait dessus, explique Jacques Hauser, 48 ans, chef de partie, entré au casino en 1982 et délégué syndical FO. Aujourd'hui, on a perdu 40% de notre salaire malgré la réduction des effectifs et une réorganisation du travail... On demande que notre salaire arrête de baisser. »
Les machines à sous ont bouleversé l'équilibre financier de l'établissement comme celui des autres casinos français. Le produit brut des jeux (PBJ) qui est la différence entre les mises et les gains des joueurs, est de 28M€ par an dont seulement 2,2M€ proviennent des jeux traditionnels.
« La direction veut baisser de deux heures par jour de semaine l'ouverture de jeux traditionnels, complète Martin Fischer, 42 ans, chef de table, entré au casino en 1984 et délégué syndical CFDT. Ça fait 32h par mois, ca va encore accélérer la baisse des pourboires ».
Selon la direction, le salaire mensuel brut moyen des employés de la salle de jeux (sans les cadres) s'établit, au cours des 12 derniers mois, à 1 657 €. « Ce à quoi il faut ajouter la participation, précise Laurent Balmier, 35 ans, directeur du casino. Il est bien question, là, de faire profiter et de répartir les richesses générées par l'entreprise... En moyenne, selon les années, cela représente de 1 à 1,5 mois de salaire. »
Grève dès aujourd'hui
Les salariés affectés aux machines à sous (une quarantaine de salariés pour 185 machines) n'ont que très peu de pourboire mais perçoivent un 13e mois. Ce qui fait dire aux observateurs que l'établissement de niederbronn-les-Bains n'est pas des plus mauvais payeurs. Mais la dynamique à la baisse engagée sur les rémunérations de la quarantaine de croupiers inquiète. C'est pourquoi FO et la CFDT appellent à la grève, reconductible, dès cet après-midi autour des tables. Le casino fait savoir que l'activité sera assurée.
(source : d
na.fr/Olivier Claudo
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