Tous les jeux d'argent sont réglementés et contrôlés, et ce depuis l'empire romain.
La loi française prohibe, en principe, l’organisation de jeux de hasard et de paris hippiques (sauf ceux du PMU). Quant aux autres paris sportifs, ils sont réservés à la Française des jeux, qui détient aussi le monopole des loteries.
Concours et loteries gratuites
Les jeux d’adresse, à savoir ceux qui font appel à la culture générale ou à la sagacité du joueur plutôt qu’au hasard sont légaux.
Tout sera donc affaire d’appréciation au cas par cas. En outre, les loteries sont légales si elles sont gratuites. Toutefois, dans le cas de loteries " gratuites " organisées par correspondance, téléphone ou minitel, les tribunaux ont considéré que le simple coût de l'affranchissement ou de la communication téléphonique constituait un " prix de participation " suffisant pour rendre la loterie onéreuse et donc illicite.
C’est la raison pour laquelle des opérateurs de sites web et de loteries par SMS ont imaginé de proposer aux joueurs le remboursement de leurs frais de connexion ou d’envoi.
Même dans le cas de loteries gratuites, des règles s’appliquent, issues du Code de la consommation. Ainsi, un règlement doit être déposé chez un huissier. Il devra reproduire la mention suivante : "le règlement des opérations est adressé, à titre gratuit, à toute personne qui en fait la demande", et préciser, en outre, l'adresse à laquelle peut être envoyée cette demande ainsi que le nom de l'officier ministériel auprès de qui ledit règlement a été déposé.
En pratique, le règlement sera également publié sur le site web de l’organisateur.
Les jeux de casinos
Les textes spécifient ce qui est autorisé, le reste étant par définition interdit.
Il faut être majeur, donc avoir au moins 18 ans, pour entrer dans un casino. Les mineurs émancipés n'ont pas le droit d'entrer dans la salle de jeux. L'état n'autorise pas non plus la mise à disposition de lieux réservés aux enfants au sein de l'établissement, ce qui peut donner des situations cocasses devant les casinos ou dans l'entrée...
En vertu de l’article 1er de la du 12 juillet 1983 relative aux jeux de hasard, « Le fait de participer, y compris en tant que banquier, à la tenue d’une maison de jeux de hasard où le public est librement admis, même lorsque cette admission est subordonnée à la présentation d’un affilié, est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30000 euros d’amende. »
Il est toutefois permis de déroger à cette interdiction de principe d’organiser des « maison de jeux de hasard » dans les conditions fixées par la loi du 15 juin 1907 : «… il pourra être accordé aux casinos des stations balnéaires, thermales ou climatiques, sous quelque nom que ces établissements soient désignés, l’autorisation temporaire d’ouvrir au public des locaux spéciaux, distincts et séparés où sont pratiqués certains jeux de hasard ».
Cette autorisation est accordée par arrêté du Ministre de l’Intérieur, après enquête, et en considération d’un cahier des charges établi par le conseil municipal de la commune sur laquelle s’implante le casino, et approuvé par le Ministre de l’Intérieur.
Ce régime de dérogation a été étendu, à certaines conditions, par l’article 57 de la loi du 5 janvier 1988 (dite « Amendement Chaban ») aux villes de plus de 500.000 habitants.
L’esprit de la législation est de ne permettre la création de casinos que si ceux—ci contribuent au financement des activités culturelles, artistiques ou d’utilité publique.
La loi du 15 juin 1907 a fait l’objet d’un décret d’application (décret du 22 décembre 1959), qui fixe notamment les obligations du titulaire de l’autorisation, le fonctionnement des casinos, et les conditions d’accès dans les salles de jeux.
Par application de l’article 22 du décret, celui-ci a fait l’objet d’un arrêté d’application en date du 23 décembre 1959, qui précise notamment les conditions d ‘établissement et d’instruction des demandes d’autorisation, les modalités d’administration et de fonctionnement des casinos, ainsi que les règles de fonctionnement des jeux.
Selon l’article premier de cet arrêté, « Un casino est un établissement comportant trois activités distinctes : le spectacle, la restauration et le jeu, réunies sous une direction unique sans qu’aucune d’elles puisse être affermée. »
Les jeux de hasard transfrontaliers en Europe : admis dans un certaine mesure
Dans un arrêt du 6 novembre 2003 (affaire « Gambelli ») la Cour de justice des Communautés européennes a estimé qu’un Etat membre (en l’occurrence l’Italie) ne peut invoquer ni la protection du consommateur ni la protection de l’ordre public (lutte contre le blanchiment et le crime organisé) pour justifier une restriction à l’offre de paris depuis un bookmaker anglais opérant sur l’internet, dans la mesure où :
- Depuis des années, l’Etat italien n’a de cesse de mettre en oeuvre une politique visant à accroître l’offre de jeux au profit des opérateurs de paris sportifs italiens autorisés. L’Italie ne poursuit donc plus une politique visant à modérer la passion du jeu au sein de sa population (argument traditionnel avancé par les Etats membres pour justifier les restrictions et prohibitions imposées à la concurrence étrangère).
- Le bookmaker anglais poursuivi en Italie est soumis à un régime d’autorisation et de contrôle très strict, qui exclut raisonnablement toute crainte de blanchiment de capitaux et de crime organisé (autre argument traditionnel avancé par les Etats membres).
En France, l'activité des casinos en ligne est a priori interdite. Pourtant, on ne peut s’empêcher de relever une attitude ambivalente des pouvoirs publics français, comparable à la situation italienne. En effet, l’Etat prélève des recettes importantes sur le produit des jeux, mais cette activité est pourtant perçue comme immorale. Parallèlement, l’Etat, actionnaire majoritaire de la Française des Jeux, mène une
politique de développement très active, à tel point qu’un rapport du Sénat (rapport « Trucy ») parle d’« Etat croupier ». De ce fait, la législation sur les jeux et notamment l’interdiction des casinos en ligne pourrait être contraire aux articles 43 et 49 du traité CE. En effet, on peut douter du caractère « cohérent et systématique » de la
politique française visant à réduire l’offre de jeux d’argent .
Notons qu’en Allemagne et aux Pays-Bas, la dernière jurisprudence « post-Gambelli » a estimé que, dans les faits, leurs législations et pratiques nationales n’étaient manifestement pas de nature à permettre une politique systématique et cohérente visant à réduire l’offre de jeux d’argent.
C’est dans ce contexte, très contentieux et instable, que la Commission européenne a décidé en janvier 2004 de poser la question d’une harmonisation spécifique de ce secteur. La Commission souhaite harmoniser les services de jeux, loteries et paris d’ici 2010. Dans l’intervalle, la Commission a annoncé qu’elle lancerait une vaste consultation des acteurs concernés.
Affaire à suivre…
(source : droit-technologie.org/Thibault Verbiest (Avocat aux barreaux de Paris et de Bruxelles (Cabinet ULYS) - Chargé de cours à l'Université Paris I))