Quand la mairie de Toulouse se prend les pieds dans le tapis vert.
L’ancien maire, Dominique Baudis, s’y était refusé. À l’inverse, ses successeurs au Capitole, - Philippe Douste-Blazy, puis Jean-Luc Moudenc, ont très vite voulu ériger un casino dans la Ville rose. Alors que la catastrophe d’AZF avait laissé derrière elle de considérables dégâts humains et matériels, la droite toulousaine a pensé qu’il n’y avait rien de plus indispensable qu’un établissement de jeux avec machines à sous. Dès le 8 novembre 2002, le conseil municipal approuvait le principe d’un casino. L’ouverture était prévue pour la fin 2004 mais, on peut l’affirmer, c’est raté.
Au bout de deux ans, le projet de casino n’est guère allé au-delà de la case départ et, dans cette affaire de roulette et de machines à sous, la mairie a joué de malchance, accumulant les bévues et les vices de forme. La procédure d’appel d’offres a déjà été annulée trois fois par le tribunal administratif. Parmi les dix casinotiers en concurrence, six ont jeté l’éponge et les quatre autres restent à départager.
La commission municipale chargée d’examiner les candidatures a démissionné trois fois. La dernière en date, mise en place le 14 mai dernier, est déjà hors service : l’un de ses membres, Christian Raoust, élu UMP, travaille pour un cabinet d’études lié à l’un des candidats. Il a donc remis sa démission. Le prochain conseil municipal, le 8 octobre, désignera une quatrième commission d’appel d’offres. À terme, la préfecture puis le ministère de l’Intérieur devront valider le choix du Capitole : le groupe Accor-Barrière est largement favori.
Le site choisi pour le casino paraît lui aussi en mesure de torpiller le projet : en bordure de Garonne, sur une zone inondable, et juste à côté du pôle chimique classé Seveso. Un permis de construire en un tel lieu aurait de bonnes chances d’être annulé.
Outre ces problèmes de forme, la mairie doit faire face à la fronde d’un collectif anticasino qui soulève, quant à lui, des questions de fond. Il met en avant les risques de dépendance au jeu générés par ce type d’établissements. En France, on compte déjà quatre cent mille joueurs dépendants. Avec de lourdes conséquences sur la situation sociale et familiale de chacun.
À Toulouse, les risques paraissent d’autant plus élevés que le casino serait implanté à proximité de la grande cité populaire d’Empalot, où le taux de chômage s’élève à 33 %. Les nombreuses personnes en difficulté, cherchant désespérément une - issue, ne vont-elles pas perdre leurs maigres ressources dans les machines à sous ? C’est la crainte des militants et élus PCF qui, avec les Motivé-e-s, ont lancé ce mouvement d’opposition au casino. Pour eux, la dépendance au jeu est un problème de santé publique.
Du côté de la mairie, on rétorque que le casino créerait 200 à 300 emplois et - rapporterait chaque année 2 millions d’euros à la ville. Les opposants contestent ces - arguments, considérant que l’argent perdu dans les bandits manchots ne serait donc plus dépensé dans les commerces et ne profiterait plus à l’économie locale. Le collectif a lancé une pétition et demande l’organisation d’un référendum. Avant même d’être construit en zone inondable, le casino prend déjà l’eau.
(source : humanite.presse.fr/Bruno Vincens)