Bercy se refuse, pour l'heure, à légaliser les casinos en ligne, mais recevra, mercredi matin, les décideurs économiques et les acteurs institutionnels concernés. Chacun joue sa carte et fait monter les enchères.
Tout va bien, les jeux ne sont pas encore faits. Après avoir annoncé, le 27 octobre, le retrait de l'amendement gouvernemental visant à légaliser les casinos en ligne dans le cadre du projet de loi de finances 2025, le ministre du Budget et des Comptes publics, Laurent Saint-Martin, convoque, mercredi matin à Bercy, les parties prenantes pour une première réunion de concertation.
Le marché des jeux en ligne est en effet en pleine croissance. Selon l'Autorité nationale des jeux (ANJ), le produit brut des jeux a atteint, en 2023, 2,3 milliards d'euros. Soit 7,2% de plus qu'en 2022. Quant aux 203 casinos physiques - ce qui fait de la France le champion d'Europe -, ils ont rapporté près de 2,5 milliards d'euros en 2022, selon une étude de Xerfi publiée en décembre dernier. Pour ce qui est des casinos en ligne, la manne des joueurs français est, à date, captée par des opérateurs domiciliés à l'étranger.
La fiscalité des gains en ligne de mire
Demain à 8 heures, sont donc conviés les décideurs économiques comme le syndicat Casinos de France - présidé par Grégory Rabuel, le patron du groupe Barrière -, l'Association des Casinos Indépendants Français (ACIF), le PMU, France Galop, Trotteur français, l'Association française des jeux en ligne (AFJEL) - présidée par Nicolas Béraud, fondateur de Betclic -, Winamax, BGC ou encore la société britannique Flutter.
Mais aussi les acteurs institutionnels comme l'Autorité nationale des jeux, l'Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT), Additions France, la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca), la Fédération Addictions et bien sûr l'association des maires de France (AMF), montée au créneau dès le 24 octobre.
« L'intérêt est d'avoir tous les acteurs autour de la table et de trouver un terrain d'entente sur la prévention, les garanties et les gains de fiscalité », explique, à La Tribune, le cabinet du ministre du Budget et des Comptes publics.
Les maires refusent d'être pénalisés
Il s'agit d'aboutir à « un schéma qui permettrait la mise en place de ces casinos en ligne tout en limitant au maximum les inconvénients pour les établissements préexistants ». « Nous ne pouvons plus rester sur des postures mais déboucher sur des objectifs partagés », insiste l'entourage de Laurent Saint-Martin.
Et pour cause, les élus locaux ne peuvent pas se permettre de faire tapis. Selon la taille de leur ville, les casinos leur rapportent entre 500.000 et 17 millions d'euros de rentrées fiscales annuelles, sans compter l'effet d'entraînement sur l'offre culturelle.
« J'ai une conviction: il va falloir régulariser et réguler les casinos en ligne, mais trouvons un système équilibré, une équité territoriale, pour que les communes ne soient pas pénalisées », déclare, à La Tribune, David Lisnard, maire (Nouvelle énergie) de cannes et président de l'association des maires de France (AMF).
La pression monte sur le gouvernement Barnier
L'AMF participera donc à ce raout en la personne de Philippe Augier, l'édile (Horizons) de Deauville (Calvados), mais affirme déjà que « ça va prendre des mois pour que tout le monde se mette d'accord ». « Il faudra trouver une juste répartition de la charge et de la manne financière », prévient David Lisnard.
Pour l'heure, l'équipe du ministre du Budget et des Comptes publics se refuse, elle, à parler de calendrier: « Est-ce que ce sera dans les délais de l'examen du projet de loi de finances ou bien est-ce que ce sera plus tard ? Nous ne voulons rien préempter » affirme encore le cabinet de Laurent Saint-Martin.
Reste que la pression monte sur le gouvernement Barnier. La France est le dernier pays de l'Union européenne avec Chypre à ne pas avoir encore régularisé les casinos en ligne. Et ce, alors que le nombre de joueurs ne fait que croître, selon les professionnels.
(source : latribune.fr/César Armand)