C’est un projet en passe de devenir un serpent de mer : l’ouverture d’un casino à Pompadour (Corrèze). Les élus corréziens travaillent à faire tomber la barrière législative pour que la cité du cheval puisse en avoir un. L’enjeu derrière un tel établissement : financer les infrastructures et les événements équestres (courses, compétitions…) alors que l’État se retire peu à peu de la filière cheval.
Maintenant six ans que Pompadour fait tout pour avoir son casino. Pompadour, son château, son hippodrome, son haras, ses 170 rendez-vous équestres par an… Des événements et des infrastructures qui coûtent cher à entretenir alors que l’État, par l’intermédiaire de l’Institut français du cheval, s’implique moins d’année en année. Où en est-on de ce dossier qui a, pour l’instant, tout d’un serpent de mer ?
Les tentatives pour faire tomber la barrière législative Pompadour n’est pas une station thermale, ni balnéaire, encore moins climatique. Elle n’est pas non plus une métropole de plus de 500.000 habitants… En résumé, Pompadour n’entre pas dans les critères pour pouvoir avoir un casino. Seule solution : changer la loi. En 2019, une proposition de loi au Sénat est restée lettre morte. Pascal Coste propose \"un deal\" à Gérald Darmanin pour ouvrir un casino à Pompadour (Corrèze) Le 29 novembre dernier, Frédérique Meunier et Francis Dubois, députés de la Corrèze, repartent à la charge avec une proposition de loi. Elle autorise l’installation d’un casino dans des communes comportant « un établissement de l’Institut français du cheval et de l’équitation (IFCE) et ayant une attractivité particulière liée à l’organisation de courses ou concours hippiques au rayonnement national ou international ». La même proposition de loi a été déposée au même moment par les députés du Maine-et-Loire. Et maintenant… « J’ai eu un entretien avec le cabinet du ministre de l’Intérieur, précise Frédérique Meunier. Il m’a dit qu’en 2024, il y aurait une loi pour les cercles de jeux (autorisés à ouvrir à Paris en 2018 N.D.L.R.) et que cette proposition pourrait être intégrée dans cette loi. On en est là. » Alain Tisseuil, le maire de Pompadour, voit bien un obstacle législatif franchi en 2024.
Ensuite, sa commune pourra lancer une délégation de service public pour choisir un casinotier. « Un casino, c’est en fait un binôme casino/commune. Il y a une fiscalité propre, c’est parfois le premier employeur. C’est une délégation de service public avec des jeux, de la restauration et une contribution à l’activité culturelle de la commune. Les DSP sont souvent de quinze à vingt ans », détaille Philippe Bon, délégué général du syndicat des Casinos de France qui se dit favorable à l’ouverture de casinos à Pompadour et à Saumur. « La marge de manœuvre est assez délicate. Si vous libérez les implantations, vous déséquilibrez le maillage actuel. » En somme, deux ça va, vingt-cinq c’est trop. Un sujet crucial pour Pompadour « Si on n’a pas de casino, les haras de Pompadour sont à vendre, pose Alain Tisseuil. L’IFCE lancera un appel à manifestation d’intérêt pour le château, le site de puy Marmont (où sont organisés les concours N.D.L.R.). » Un risque que déplore également Philippe Bombardier, président de la société de concours hippiques de Pompadour. « On assiste au désengagement progressif de l’État de la filière cheval. Il y a des velléités de l’IFCE de chercher un privé pour gérer le site, alors qu’il y a une vraie synergie entre la société des concours, celle des courses, Scènes de manège qui organise notamment les visites du château, le club de rugby qui vient aussi donner un coup de main… » Un casino, une chance pour Pompadour et la Corrèze Une synergie qui ne permet toutefois pas de financer l’entretien du site de puy Marmont. « Il faut entre 300 et 400.000 euros par an », précise Philippe Bombardier. Alain Tisseuil évoque 350.000 euros pour organiser les 170 journées d’événements. Une somme qui, selon lui, sera largement couverte par les recettes fiscales générées par un casino. « En 2023, le nombre d’événements restera le même, en 2024, sensiblement la même chose aussi. Mais ensuite, si on n’a pas le casino, ça va se déliter… », prévient le maire. À Philippe Bombardier d’ajouter : « sans cheval, Pompadour devient Lubersac. Attention, je n’ai rien contre Lubersac. » Un casino est-il vraiment la solution ? Les recettes fiscales d’un casino dans une petite commune sont importantes. « Quand le président Emmanuel Macron a fait sa tournée en France après la crise des gilets jaunes, il a eu de nombreuses remontées comme quoi la commune d’à côté nageait dans le bonheur grâce à son casino. Alors \"pourquoi pas moi\", lui a-t-on lancé », raconte Philippe Bon. Seulement, les casinos ont beaucoup souffert de la crise du covid et de plusieurs mois de fermeture. Certains ont même fait faillite comme celui de Saint-Nectaire (Puy-de-Dôme) qui a rouvert ses portes en août dernier après deux années de fermeture. Le casino de Pompadour, lui, aura déjà un avantage, celui de n'avoir aucune concurrence à moins de 100 km à la ronde. 1,085 milliard C’est en euros le produit brut total des jeux (PBJ) c’est-à-dire ce que les casinos encaissent après redistribution des gains et avant versement des prélèvements obligatoires à l’État et aux collectivités locales, pour 2020-2021, en France. Les machines à sous représentent plus de 85 % de ce produit brut total des jeux. 30 à 80 % Les casinos sont souvent les premiers contributeurs de leur commune d’accueil. L’apport du casino de Deauville représente 30 % du budget de fonctionnement de la commune. Cela peut aller jusqu’à 80 % pour des communes plus petites comme Barbazan (Haute-Garonne).
(source : lamontagne.fr/Emilie Auffret)