Le chef présumé des arnaqueurs à la roulette anglaise, arrêté en Espagne, a été condamné à 18 mois de prison ferme. Il devra rembourser avec ses complices plus de 127 000 euros, le montant du préjudice subi.
« Bacaloa », Carlos V., de son vrai nom, a été condamné ce jeudi soir à 18 mois de prison pour escroquerie. Arrêté en Espagne, celui qui était considéré comme le chef d’équipe des arnaqueurs de la roulette anglaise était rejugé par le tribunal correctionnel de Pontoise un an après une première audience où deux de ses complices avaient été condamnés sans lui. Il devra aussi participer au remboursement des 127 000 euros de préjudice réclamé par le casino d’Enghien après leur passage au cours du mois d’août 2018.
L’arnaque s’appelle « Colour up scan » et se joue sur le mode du bonneteau, en équipe. Elle serait décrite depuis les années 1920 et réside dans la manipulation des jetons de couleur dont chaque joueur détermine la valeur à l’achat à la table : de 5 à 100 euros. Avec un peu d’habileté et le concours de complices qui détournent l’attention du croupier, s’il le faut en commandant une boisson ou en organisant une bousculade, le joueur dissimule des jetons dans sa poche, quitte la table, ce qui est proscrit avec des jetons. Il les transmet discrètement à un complice dans les toilettes, le seul endroit dépourvu de caméra. Le complice qui avait acheté des jetons de même couleur mais pour une valeur nominale de 100 euros au lieu de 5 euros récupère les espèces en multipliant ainsi par 20 la valeur du jeton.
Ils ont aussi sévi à Cassis, Cannes ou encore Lille
Le 17 août 2018, le chef de la sécurité du casino d’Enghien était intrigué par les quatre joueurs touchés par la baraka. Ils l’avaient repéré et s’étaient enfuis. En visionnant les vidéos sur un mois, le casino d’Enghien comprenait qu’il avait été joué. L’équipe a été filmée 7 fois entre le 9 et le 17 août 2018. Les registres des entrées relevant 32 visites depuis le 26 avril 2018. Le préjudice est chiffré ainsi à 127 300 euros pour le mois d’août par le casino qui en extrapolant, estime à 330 000 euros la somme envolée depuis avril.
Cette dernière somme ne pouvant être prise en compte par la justice. La police judiciaire a pour sa part identifié la méthode et les auteurs qui ont tenté l’aventure au-delà d’Enghien. L’équipe a écumé les casinos de Cannes, Cassis, Lille, Lyon ou Marseille mais sans grand succès, ne parvenant pas à tromper le personnel du fait d’une moins grande affluence qu’à Enghien. Seul Cassis réclame 400 euros.
Il y a un an, les petites mains avaient été jugées, « Bacaloa » avait écopé en son absence de 2 ans ferme. Au cours de cette audience et de l’enquête, les petites mains l’avaient souvent désigné comme le patron de l’équipe. « C’est lui qui m’a montré comment cacher les jetons », affirmait Nelson G., la cinquantaine, éleveur de poules en Espagne. « Il est le plus expérimenté et répartit les gains », ajoute un autre.
Son rôle de chef pas démontré
Ce jeudi, cet homme de 50 ans qui vit en Espagne et qui est originaire de la République dominicaine a admis avoir fait partie de l’équipe mais sans en avoir été le chef. « L’organisateur, à 100 %, c’est Penado », précise-t-il, en désignant un suspect en fuite. « Ma fonction, c’était d’être avec lui à la table, de tromper le croupier. Il était à côté de moi pour dire ce que je devais faire, quels jetons je devais mettre. » Si les autres le chargent, « c’est pour leur bénéfice propre », estime-t-il, reconnaissant avoir gagné 16 000 ou 17 000 €. Il a été en partie entendu par la procureur pour qui son rôle de chef n’a pas été démontré. Le tribunal abaissant la peine prononcée un an plus tôt.
« Il y a quand même une participation de la victime ! » a ironisé la défense, évoquant les failles de sécurité du casino d’Enghien. « C’est une arnaque archiconnue qui donne lieu à des formations spéciales au groupe Barrière, et qui a pourtant réussi presque à chaque fois. Ce n’est pas le génie des escrocs qui a dérouté les professionnels de la sécurité du casino. »
(source : leparisien.fr/Frédéric Naizot)