Quatorze personnes de la communauté turco-kurde viennent d’être mises en examen pour avoir installé des machines dans des petits commerces franciliens ou dans l’Oise.
L'affaire rappelle les grandes heures du grand banditisme marseillais, avec des machines à sous clandestines disséminées dans des bars et des commerces interlopes. Depuis plusieurs mois, les policiers du Service central des courses et jeux (SCCJ) surveillaient de très près une trentaine de personnes issues des communautés turques et kurdes et suspectées d'engranger des centaines de milliers d'euros grâce à ces machines illégales. Ici, pas de clinquants casinos ou de cercles de jeux feutrés, mais des bars sans envergure, des salons de thé et même des salons de coiffure qui abritaient de discrètes maisons de jeux.
En deux phases, les policiers du SCCJ, épaulés des équipes de la police judiciaire de Lille, Versailles ou de Rouen, des offices spécialisés, et de gendarmes, - 80 fonctionnaires mobilisés au total - ont interpellé 35 personnes âgées de 24 à 57 ans dans le Val-d'Oise, l'Oise, la Seine-Saint-Denis et de l'Eure. Toutes sont connues de la justice pour des escroqueries, du travail dissimulé ou des affaires de violences.
80 commerces perquisitionnés
À l'automne dernier, les enquêteurs du SCCJ apprennent lors du démantèlement d'un groupe criminel turco-kurde l'existence de ce réseau de jeux clandestins. Une enquête est mise en place sous l'égide de la Juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Paris : surveillances, écoutes… les policiers parviennent à clarifier le fonctionnement des malfaiteurs. Depuis au moins trois ans, la tête pensante du groupe achetait à l'étranger des machines à sous électronique, ou recyclait de vieilles machines. Plusieurs lieutenants étaient, eux, chargés de placer les machines à sous auprès des commerçants sélectionnés. « Ils pouvaient faire pression sur des commerçants, souligne une source proche de l'enquête. Parfois, ils utilisaient la violence pour obliger les commerçants, dont certains avaient des dettes, à installer les machines à sous chez eux. » Certains commerçants pouvaient par ailleurs percevoir jusqu'à la moitié des gains de chaque machine.
Lors des interpellations, 80 commerces ont été perquisitionnés par les enquêteurs. Ils ont saisi 25 machines à sous électroniques. Selon les enquêteurs, chacune d'entre elle pouvait rapporter plusieurs dizaines de milliers d'euros par an. « Ce fonctionnement permettait au réseau de gagner environ 1 million d'euros par an, estime une source proche du dossier. Et leur business fonctionnait depuis au moins trois ans. » 80 000 euros et en liquide, une arme de poing et plusieurs véhicules ont été saisis par les policiers. Une grande partie de l'argent aurait été blanchie dans le pays d'origine des mis en cause. Aucun lien n'a pour l'instant été effectué avec un quelconque réseau terroriste ou politique.
Finalement quatorze suspects ont été mis en examen par un juge d'instruction de la Juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Paris pour exploitation, mise à disposition et détention d'appareils à jeux interdits en bande organisée, association de malfaiteurs, abus de biens sociaux et blanchiment.
(source : leparisien.fr/Jean-Michel Décugis et Vincent Gautronneau)