Philippe Sueur, maire (Dvd) d'Enghien (Val-d'Oise), exprime son inquiétude après l'annonce de la privatisation de la Française des jeux.
Philippe Sueur, maire (Dvd) d’Enghien, exprime son inquiétude après l’annonce de la privatisation de la Française des jeux et le risque de voir s’installer, dans ses points de vente, des terminaux de jeu qui pourraient concurrencer les machines à sous du casino.
En juillet 2019, le groupe Barrière, premier casinotier de France, avait alerté des parlementaires pour les sensibiliser sur l’ouverture de certains jeux au grand public, alors qu’ils sont réglementés dans ses établissements.
Le casino d’Enghien, qui dispose de 500 machines à sous, est le premier de France en produit brut des jeux.
Il emploie six cents salariés et représente 30 % du budget de la commune.
Président de l’association nationale des élus des territoires touristiques (Anett), Philippe Sueur a transmis ses inquiétudes à l’État.
Quelle est votre crainte, avec la privatisation de la Française des jeux ?
Elle porte sur trois points : le contrôle des mineurs, l’addiction et le blanchiment d’argent. Des sujets sur lesquels les casinos sont contrôlés, alors qu’avec l’ouverture de terminaux dans divers points de vente, aucun contrôle ne pourra être fait. La police des jeux permet d’éviter les dérives auprès des mineurs et le blanchiment d’argent, ce qui ne serait pas assuré avec une libéralisation du jeu électronique en libre accès.
Êtes-vous inquiet pour l’avenir des casinos en France ?
Un peu moins, depuis que Bruno Le Maire (ministre de l’Économie et des Finances), m’a assuré qu’il n’y aurait pas de jeux à gain instantané dans les points de ventes. Il y aurait, cependant, des colonnes de jeu électronique, limitées à une par point de vente. Le taux de redistribution (la part qui revient au joueur) sera inférieur à celui des machines à sous des casinos qui est de 85 %. Il serait de 65 % avec la Fdj, qui conserverait une belle part. La politique d’une entreprise privée, comme le sera demain la Fdj, c’est le développement à outrance.
Et du côté de la Française des jeux, avez-vous évoqué le sujet ?
J’ai échangé avec un directeur des relations publiques, qui a tenté de me rassurer, en me disant, qu’il n’y aurait pas de crainte de concurrence. Mais, avec une privatisation, il faut développer le chiffre d’affaires. Lorsque vous investissez , il faut un retour. Jusqu’à présent, les dividendes de la Fdj étaient ponctionnés en majorité par l’État. Une modeste part revenait à diverses œuvres sociales : buralistes, anciens combattants, veuves de guerre, handicapés… Aujourd’hui, les buralistes disparaissent. Il y en a environ 400 en moins par an. Le but, désormais, sera de sortir des bureaux de tabac et débits de boissons, pour aller dans des supérettes, galeries marchandes et autres espaces publics. La stratégie d’implantation serait que l’on soit à moins de dix minutes d’un point de jeu. En province, les établissements de jeu regardent la privatisation du coin de l’œil.
Une autre menace existe avec les clubs de jeux à Paris, dont l’autorisation pourrait s’étendre au reste de la France ?
L’expérience est toujours en cours à Paris. Barrière a ouvert le sien aux Champs-Elysées. Il pourrait y avoir une douzaine de clubs dans la capitale, mais le risque serait que l’État autorise ces clubs dans le reste du pays. La loi n’exclut pas cette hypothèse. N’importe quel opérateur de jeu peut demander une ouverture de club. Seulement, à la différence du développement des jeux de la Fdj, les clubs sont soumis à la même directive de contrôle que les casinos. Or, l’activité des jeux demande de la rigueur dans son exploitation.
(source : actu.fr/ Fabrice Cahen)