Avec le recrutement de deux anciens pontes du ministère de l'Intérieur, le groupe Partouche veut bien commencer l'année.
Leur recrutement tient sans doute davantage du coup de poing que du coup de poker. Le groupe Partouche annonce ce mardi le début de sa collaboration avec deux anciens pontes du ministère de l'Intérieur qui ont en commun d'avoir occupé, jusque récemment l'un et l'autre, des postes parmi les plus prestigieux de la police nationale.
Martine Monteil d'une part, et Éric Battesti d'autre part, ont en fait rejoint les rangs du second acteur français du marché des casinos depuis le 1er janvier 2019, mais leur arrivée n'avait pas filtré jusqu'alors. Rattachés au président du directoire du groupe Fabrice Paire, ils ont pour mission d'accompagner le casinotier dans "ses missions et ses rapports avec ses autorités de tutelle" et notamment la place Beauvau.
Martine Monteil, une pionnière de la police
Martine Monteil, qui a achevé sa carrière au rang de Préfet honoraire, a récemment été élevée au rang de grand officier de l'Ordre du Mérite, mais elle est surtout connue dans les rangs de la police pour avoir fait figure de pionnière, comme le rappelle le groupe Partouche dans un communiqué. Sortie major de sa promotion en 1978, elle devient la même année l'une des premières femmes commissaire de police. En 1994, elle devient chef de la brigade de répression du banditisme de Paris, là encore une première. Idem en 1996 lorsqu'elle prend la tête de la brigade criminelle. Fille et petite fille de policier, Martine Monteil est nommée en 2002 directeur régional de la police judiciaire (PJ) de la Préfecture de police de Paris, avant de prendre la tête, deux ans plus tard, de la direction centrale de la Police judiciaire. A chaque fois l'histoire se répète, elle est la première femme à embrasser ces fonctions.
Eric Battesti a lui intégré la Police nationale en 1981 au sein de la direction des Renseignements Généraux. Un service qui aura justement conservé dans son giron près d'un siècle durant le Service central des courses et jeux (SCCJ), celui là même chargé de contrôler les casinotiers.
Il rejoindra ensuite la PJ de Versailles, avant de diriger les Renseignements généraux en Corse jusqu'en 2007. Passé par les ambassades de France à Londres et à Pékin en tant qu'attaché de sécurité intérieure, il vient d'achever sa carrière place Beauvau où il occupait dernièrement les fonctions de conseiller diplomatique auprès de l'ex-ministre Gérard Collomb. Promu au grade de Commissaire général de police en mars dernier, il a fait valoir ses droits à la retraite dans la foulée en octobre. Une retraite de courte durée.
Une double arrivée en forme de contre-pied
L'arrivée de ces deux ex "grands flics" intervient dans un contexte où les rapports entre le casinotier qui emploie quelque 4500 collaborateurs et son autorité de tutelle se sont passablement tendus ces derniers mois. Le groupe Partouche allant jusqu'à poursuivre en diffamation le commissaire Philippe Ménard, actuel patron du SCCJ, pour des propos tenus dans la presse à la suite de perquisitions menées en mars 2018 au sein du 3.14, luxueux hôtel Partouche dont les premiers niveaux abritent le casino emblématique du groupe. L'opération de police avait débouché sur des gardes à vue et la mise en examen de deux dirigeants du casino pour "abus de biens sociaux" au détriment de l'établissement, qui s'est constitué partie civile.
Une première plainte bientôt accompagnée d'une seconde, cette fois contre X, mais visant en filigrane elle aussi les services de police, pour violation du secret de l'instruction. Partouche ayant peu goûté la couverture médiatique de l'opération qui avait mis à mal son cours de Bourse au printemps dernier.
Contacté par L'Express, le patron du casinotier Fabrice Paire se félicite de cette double arrivée mais se refuse à en faire un changement de stratégie dans son rapport à ses autorités de tutelle. "Nous avons toujours été transparents et dans le dialogues avec les autorités. Cette double arrivée ne fait que renforcer cela", estime l'homme fort du groupe Partouche pour qui "ces deux éminentes personnalités ne collaboreraient pas avec [Partouche] si elles n'étaient pas convaincues de notre rigueur et de notre sérieux".
Parfaits connaisseurs des rouages de la place Beauvau, Martine Monteil et Eric Battesti sont en tous cas taillés pour mettre de l'huile dans les cylindres du casinotier et des fonctionnaires en charge de la régulation du secteur.
(source : lexpress.fr/ Benoist Fechner)