Depuis 2015, la croissance revient sur un marché fragilisé.
Ils faisaient pâle figure les casinotiers quand les jeux en ligne débarquaient sur leurs plates-bandes à la fin des années 2000. Sept ans de morosité : la fréquentation qui baisse, et le chiffre d’affaires qui s’effrite. Rien ne va plus.
Mais depuis 2015, les établissements de jeux sortent peu à peu la tête hors de l’eau, en particulier dans l’Hérault, l’un des cinq départements français les plus garnis (huit établissements). Pour la troisième année consécutive, en 2017, le produit brut des jeux (PBJ) - la part des mises récupérée par les casinos après paiement des gains aux joueurs - est de 2,292 milliards d’euros répartis sur 200 casinos, soit une légère hausse de 2,45 %, contre + 2,59 % en 2016 (contre 2,750 en 2007).
Faire un lieu de vie
Les casinos de palavas et de La Grande-Motte (groupe Partouche) progressent. Ce dernier gagne 4,88 % de PBJ en 2017 (soit plus de 27 M€), grimpant ainsi à la seizième place du classement des casinos français. Le Flamingo (groupe Tranchant) du Grau-du-Roi (36e place) connaît une croissance de 7,27 % (17 M€), après une année 2016 à + 16,45 %.
Costume noir et chemise blanche sans cravate, Nicolas Martinez, l’air sobre et concentré, nous fait visiter cet établissement qu’il dirige depuis 5 ans. "L’important, c’est l’image", attaque-t-il d’emblée. "Nous avons tout réorganisé en 2016 pour remettre le jeu au coeur de ce lieu."
Depuis l’entrée, le couloir qui mène au restaurant, la terrasse, ou le restaurant, les machines à sous sont visibles. "Il y a 20 ans, les jeux, nous ne les montrions pas. Les joueurs venaient, misaient leurs sous et repartaient. Aujourd’hui, on tient la porte, on se montre, et tous les services qui gravitent ici sont là pour faire du casino un lieu de loisirs ouvert à tous." La décoration a été entièrement revue elle aussi. Exit la moquette épaisse rouge surannée et les éclairages néons bariolés. Le mobilier est désormais sobre et moderne.
Attirer les jeunes
Si les retraités constituent l’une des catégories socioprofessionnelles les plus représentées (17,80 %), les casinotiers draguent les plus jeunes, en particulier l’été.
"En période estivale, on gagne 40 % en fréquentation. Et même si le chiffre d’affaires ne progresse que de 15 % par rapport aux autres mois, le but est de devenir un carrefour de vie. Il y a ceux qui jouent 20 € et vont au restaurant, ceux qui restent toute la journée ou encore ceux qui viennent ici en présoirée", conclut Nicolas Martinez.
Fondamentalement, les casinos deviennent de plus en plus des lieux de passage, et pas de destination. Le lieu d’implantation des établissements de jeux est donc devenu un enjeu stratégique. Olivier Stachowiak, directeur du casino Barrière du Cap d’Agde, en a fait l’expérience. Installé jusqu’à peu sur une île garnie de boîtes de nuit (la bien nommée île des Loisirs), la clientèle s’y rendait à dessein, et donc… de moins en moins.
"Depuis le début du mois, nous avons déménagé à l’entrée de la station, dans un lieu qui va accueillir prochainement un palais des congrès et des dizaines de commerces. Par rapport au mois de juillet de l’année dernière, nous sommes déjà à +20 %", poursuit l’intéressé. Ici, on peut venir au concert ou au cabaret, et "jouer de l’argent sans perdre sa chemise."
Un marché fragile
Malgré tout, en France, le marché du jeu en dur reste fragile. Jean-François Cot, président du syndicat des Casinos de France, rappelle que 41 % du parc français a vu leur PJB baisser en 2017, et qu’une trentaine a de sérieuses difficultés financières. La croissance reste portée par les grands groupes (comme Barrière et Partouche) qui ont la capacité d’investir, et par les spécificités territoriales. Dans l’Hérault, le volume des mises par habitant en casino avoisine les 600 €, soit plus de deux fois la moyenne métropolitaine. La roulette n’a pas encore fini de tourner !
(source : midilibre.fr/CHARLES PERRAGIN)