Un tournoi de poker opposant un ordinateur et des joueurs pro vient de débuter aux Etats-Unis.
Un tournoi de poker dans un casino, quoi de plus banal. Ce qui l'est moins en revanche, c'est lorsque l'un des joueurs est... une machine. Depuis mercredi, une drôle de compétition a débuté au Rivers Casino de Pittsburgh, aux Etats-Unis : quatre joueurs professionnels se relaient pour affronter un programme informatique, baptisé Libratus. Développé par les chercheurs en sciences informatiques de l'université de Carnegie Mellon, il utilise des technologies d'intelligence artificielle.
Le tournoi, retransmis en direct sur la plate-forme internet Twitch, doit durer 20 jours. Il s'agit d'une version dérivée du poker : le « Texas Hold'Em no-Limit Heads up ». Les joueurs sont face à face, ils possèdent deux cartes chacun (cachées), et le reste du jeu (cinq cartes) est commun. Au total, environ 120.000 parties (mains) seront jouées. A la clé, 200.000 dollars à se partager pour les vainqueurs... s'ils sont humains.
Ce n'est pas encore gagné, car, à l'issue des premiers jours, c'est l'ordinateur qui mène. En 2015, un tournoi similaire (80.000 mains) avait eu lieu. Le logiciel, déjà développé par l'université de Carnegie Mellon, avait été battu, mais de peu. Les chercheurs assurent avoir retravaillé leur copie pour ne pas subir une nouvelle défaite.
Faites vos jeux, rien ne va plus
La machine a déjà remporté plusieurs victoires sur l'homme. C'était le cas en 1997, avec le programme Deep Blue d'IBM qui avait battu le champion d'échecs Gary Kasparov, mais aussi en 2011 avec Watson (IBM encore) et le jeu Jeopardy, et enfin l'an dernier avec la victoire très médiatisée de AlphaGo (Google) contre le meilleur joueur de Go au monde. Le poker représente toutefois une autre paire de manche.
Il ne s'agit pas seulement d'évaluer des probabilités, de calculer quelles peuvent être les combinaisons possibles avec les cartes distribuées (ce qu'un algorithme performant fait très bien). Le mensonge et le bluff font partie intégrante du jeu. « Au poker, on cache des informations, on trompe son adversaire de façon intentionnelle. C'est très difficile à jauger pour un ordinateur », a expliqué Andrew Moore, le doyen du département informatique de Carnegie Mellon, interrogé par le magazine « Fortune». « Mais la raison pour laquelle ce tournoi est important, et pas seulement d'un point de vue scientifique, c'est que nous allons montrer qu'il est possible d'apprendre à des machines à feindre, à mentir », poursuit le chercheur.
De telles avancées dans l'intelligence artificielle pourraient aider à améliorer les logiciels qui essaiment déjà dans notre quotidien via les assistants personnels comme Alexa (Amazon), Cortana (Microsoft) ou Siri (Apple). Le futur des interactions entre l'homme et la machine se joue peut-être en ce moment au casino de Pittsburgh. Faites vos jeux. Rien ne va plus.
(source : lesechos.fr/Romai
n Gueug
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