Le maire (divers droite) Christian Plantier veut déplacer l'actuel casino sur une nouvelle zone périurbaine. L'opposition socialiste, emmenée par Xavier Fortinon, s'offusque du coût de l'opération et a lancé de multiples recours juridiques. Retour sur une procédure complexe, qui est tout sauf un jeu de hasard.
« Sud Ouest » Pourquoi vouloir construire un nouveau casino à Mimizan ?
Christian Plantier Le casino actuel mourrait de mort lente. Il y a trois ans, le produit brut des jeux que touchait la mairie était de 10 %. Pour pallier les pertes du casinotier, nous avons été contraints d'accepter un produit de 0 %. Si le casino ferme, on perd le privilège des jeux, c'est-à-dire l'autorisation de l'État d'exploiter un casino. L'image de la station balnéaire en pâtirait. Si on veut garder un casino dans la commune, il faut le déplacer, c'est inexorable. La solution évidente est de l'installer en entrée de ville, avec un parking plus important et une meilleure visibilité. Ce projet s'inscrit dans une politique d'attractivité de la ville. Le casino s'intégrera dans un pôle de loisirs, dans la ZAC des Hournails. Nous y avons inauguré un skate park, et demain, certainement, un bowling et un laser game.
Xavier Fortinon Le casino est en plein centre de Mimizan-Plage. C'est le lieu historique, situé par ailleurs rue du Casino. Le risque, c'est de déplacer le centre névralgique de Mimizan et de réduire fortement l'attractivité de Mimizan-Plage. À l'heure où les dotations baissent, je ne crois pas que ce soit le rôle d'une commune d'investir dans un casino. Il y a d'autres missions de service public à raliser : beaucoup de nos infrastructures sont en train de vieillir.
N'est-ce pas un choix économique risqué ?
Ch. P. Je pense que le casinotier qui vient s'implanter (Socofinance, qui exploite le casino de Gujan-Mestras) sait où il va. Si jamais le casino ne marche pas, il pourrait très bien rompre la délégation de service public (lire ci-contre, NDLR) avant la fin du bail, mais c'est une décision très coûteuse, donc dissuasive. Il ne faut pas partir du fait que les casinos déclinent pour ne rien faire. Soit on ne fait rien, soit on prend des décisions.
X. F. Ce qui nous pose problème, c'est que les procédures ne respectent pas le Code des marchés publics, mais ce qui est surtout inquiétant, c'est le modèle économique retenu. Le casino fait à peu près 1 600 000 euros de produit brut de jeux. Le futur exploitant évoque plus de 4 millions. C'est mal évalué, puisque ce serait l'équivalent du casino de Saint-Jean-de-Luz ou de Sète. On multiplierait par trois le chiffre d'affaires : cela nous semble complètement irréaliste. Le tout, dans une époque où le chiffre d'affaires des casinos diminue.
Vous avez opté pour un bail emphytéotique administratif. En quoi cela consiste et pourquoi ce montage juridique ?
Ch. P. Le nouveau casino représente 3 millions d'euros d'investissement alors que sur une année, la Ville a une capacité d'investissement de 2 millions d'euros. On ne pouvait pas le financer de manière classique, avec un emprunt. On est donc parti sur un bail emphytéotique administratif (lire ci-contre, NDLR) qui permet de faire financer l'investissement des travaux à un groupe privé. En retour, celui-ci nous demande un loyer, compensé par celui que paiera l'exploitant du casino à la Ville pour l'occupation des lieux. On serait à l'équilibre, voire dans le positif.
X. F. Le bâtiment construit coûte pas moins de 4 millions d'euros et la commune paierait un loyer de plus de 300 000 euros par an au bailleur, le casinotier. Ce qui représenterait un coût de 6 500 000 euros pour la collectivité. C'est en ce sens que le modèle économique retenu est illusoire.
Où en sont les différents recours juridiques ?
Ch. P. Il y a eu un recours de l'exploitant actuel Cogit contre la délégation de service public. Il a obtenu gain de cause. La délégation de service public est tombée, nous avons donc relancé une procédure pour laquelle les candidatures arriveront le 16 août. Ce sont des recours non suspensifs, d'ailleurs le bâtiment est déjà élevé.
X. F. La commune vient de relancer, après le Conseil municipal du 30 juin, une nouvelle délégation de service public. Parallèlement, elle a relancé une procédure de bail emphytéotique administratif que les élus de l'opposition ont attaquée devant le tribunal administratif. Le jugement va intervenir dans le courant du dernier trimestre 2016. Nous avons décidé d'attaquer l'exploitation et la construction du bâtiment. Au terme du 30 septembre 2017, l'actuel casino disparaîtra, puisque la DSP arrivera à son terme. Il me semble difficile que la procédure soit terminée à cette date-là. On est dans l'incertitude et le bâtiment actuel pourrait se retrouver vide.
LEXIQUE
DÉLÉGATION DE SERVICE PUBLIC C’est un contrat entre une personne publique et une administration, un particulier ou une entreprise, qui gère une mission de service public rémunérée par ses recettes.
BAIL EMPHYTÉOTIQUE ADMINISTRATIF
Contrat de longue durée entre une collectivité et un bailleur privé. Pour 18 à 99 ans, la collectivité peut louer un bien à un tiers qui peut construire un ouvrage pour une mission de service public.
(source : sudouest.fr/Alexis Magnava)