Lyon - Sur un marché du jeu sinistré et vieillissant, l'exploitant de casinos Joa a fait le pari d'investir. Et il semble en passe de rafler la mise: pour la première fois depuis des années, son activité est repassée franchement dans le vert.
"Les chiffres basculent en positif", après une crise qui a vu la profession perdre 25%, voire 30% dans certaines régions, de son chiffre d'affaires, se félicite le président du directoire, Laurent Lassiaz, dans un entretien avec l'AFP.
Pour son exercice achevé fin octobre, le numéro trois français des casinos (après Partouche et Barrière) affiche une progression de 9,3% de ses entrées. Le produit brut des jeux, l'indicateur clef de la profession qui correspond à la différence entre mises et gains des joueurs, est pour sa part en hausse de 5,9%.
"nous avons nettement accéléré notre développement, avec 50 millions d'euros investis au cours des trois dernières années", explique M. Lassiaz, un ancien dirigeant du Club Méditerranée passé par le prêt-à-porter et la restauration rapide.
Et ça se voit aussi au niveau du chiffre d'affaires, qui a progressé de 8,6% pour frôler les 200 millions d'euros; 218 millions sont visés pour 2016, avec un résultat brut d'exploitation (Ebitda) en forte croissance à 32,4 millions, contre 28,5 millions cette année.
Aux manettes de l'entreprise depuis 2007, M. Lassiaz a voulu "changer le regard des gens sur le monde des casinos", confronté au vieillissement de sa clientèle. "Pour beaucoup de gens, c'est une activité ringarde réservée aux retraités", résume-t-il.
- Même une brasserie -
Cette stratégie de dépoussiérage des casinos passe par un développement à marche forcée de leurs activités non-jeu, susceptibles de faire venir une nouvelle clientèle.
"Historiquement, dans les casinos, la seule activité rentable, c'étaient les machines à sous. Tout le reste, comme les restaurants, répondait à des exigences réglementaires", relève M. Lassiaz. C'est pourtant là que le groupe va chercher sa croissance.
Joa construit ses nouveaux établissements ou modernise les anciens en les dotant de restaurants, bars, discothèques, hôtels, bowlings, voire cinémas (son établissement de Gérardmer accueille ainsi le festival du film fantastique).
Plus de la moitié du casino de Montrond-les-Bains, ouvert en 2012 près de Saint-Etienne (Loire), est ainsi consacrée à des activités hors jeu, avec une bibliothèque, un bowling et même une microbrasserie. Une piscine pour pratiquer le surf indoor est prévue à terme.
De tous les opérateurs historiques de casinos, Joa est le seul à avoir conservé une activité de paris en ligne. Encore marginale en termes de chiffre d'affaires, mais en forte progression (avec un doublement des mises ces deux derniers mois).
- Marseille en ligne de mire -
Joa exploite plutôt des établissements de taille moyenne: son site le plus important n'est que le 20ème des quelque 200 casinos français.
La société en gère désormais 22, après le rachat, devenu définitif le weekend dernier, du casino de Besançon (Doubs) auprès du rival Barrière. Une nouvelle opération de croissance externe est envisagée pour l'année en cours.
Joa répond aussi aux appels d'offres lancés par les municipalités, touristiques ou balnéaires, souhaitant se doter d'un casino.
Joa a été ainsi le seul à oser construire un nouveau casino sur les bords du lac artificiel du Der dans la Marne, à 25 minutes de voiture de la ville la plus proche. Et les résultats ont été bien au-delà des espérances, selon M. Lassiaz.
Dans quelques semaines, Joa inaugurera le casino de La Seyne-sur-Mer (Var), un investissement de 20 millions d'euros. Et le groupe sera "très attentif" si Marseille devait aller de l'avant avec son projet de casino.
Fondée à Perpignan sous le nom de Moliflor et aujourd'hui basée à Lyon, la société a changé régulièrement de mains après avoir quitté la Bourse. Elle est aujourd'hui contrôlée par le fonds d'investissement britannique Alchemy, avec plus de 50% des actions, après une conversion de titres de dette en capital.
Parmi les autres actionnaires figurent le fonds américain Davidson Kempner, la Bank of Ireland et les dirigeants, avec 10% du capital.
(source : lexpress.fr/AFP)