"On nous le demande", explique Dominique Vlasto (élue UMP au tourisme). "Lessiveuse d'argent sale", lui répond l'écologiste Sébastien Barles. Participez au débat...
Longtemps, le maire de Marseille s'est montré intransigeant, résistant à la cour effrénée des casinotiers et balayant l'hypothèse d'un théâtral : "Tant que je serai maire, il n'y aura pas de casino !". Un Jean-Claude Gaudin (UMP) se positionnant alors dans la ligne droite de Gaston Defferre, ce socialiste qui "ne voulait pas que des gens puissent dépenser en une nuit ce que d'autres gagnent en une année. C'est aussi mon avis", rappelait encore Jean-Claude Gaudin, Marseille est une ville pauvre et populaire. Comment accepter moralement un casino?"
C'était avant que l'actuel premier magistrat, se disant "convaincu par Renaud Muselier", son ancien premier adjoint, ne décide d'assouplir sa position. Un virage assumé en cours de mandat, pour des raisons économiques, et justifié par le fait "qu'il y a 25 ans, les casinos, c'était Carbone et Spirito, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. Et serions-nous plus bêtes que Lyon ou Lille, des villes détenues par des maires de gauche, qui ont un casino ? "
Lors des dernières élections municipales, le maire de Marseille a même fait de la construction d'un établissement de jeux l'un des thèmes de sa campagne, victorieuse, face à un adversaire socialiste, Patrick Mennucci, farouchement opposé. Reste que si le site du J1, propriété du Port Autonome, est visé par la Ville, l'affaire paraît loin d'être conclue. Le débat, lui, continue à être brûlant...
Dominique Vlasto (Élue UMP au tourisme) : "Dans toutes les études, on nous le demande"
OUI
"Pourquoi vouloir un casino à Marseille après avoir longtemps dit, le maire et nous-même, que nous ne sentions pas un tel établissement dans cette ville ? Chaque fois que nous faisons des études au niveau du tourisme et de l'hébergement hôtelier, il nous est reproché de ne pas avoir de vie nocturne autre que le culturel. Et la notion de casino apparaît ! Alors qu'il y a quinze ans, cette demande n'existait pas.
On se dit que le casino peut avoir cette place, mais comme, du reste, une grande boîte nuit avec des ambiances différentes. Bref, on a besoin d'activités ludiques et nouvelles ! Parce qu'on a des hôtels cinq étoiles remplis par des étrangers qui viennent et aimeraient jouer. Et franchement, ce qui vaut aussi pour les commerces, on en a assez que les gens aillent à Plan-de-Campagne ou ailleurs dépenser leur argent.
On se dit qu'avec ce casino ils resteront un peu chez nous... Je crois fermement que ça nous attirera une autre clientèle touristique, étrangère et aisée, plus importante. Si on arrive à s'entendre avec le port et à construire cette espace sur le J1, on pourrait à la fois y montrer notre excellence culturelle et posséder un site de vie nocturne qui ne dérangerait personne...
J'entends que certains estiment, en nous le reprochant, que ce futur établissement servirait blanchir de l'argent... Mais il y en a de partout, des salles de jeux, à Enghien, cassis ! Si certains veulent blanchir, ils peuvent déjà le faire à moins de 20 km ! On me parle encore de l'indécence de voir des machines à sous dans une ville pauvre. Écoutez, un casino ça rapporte aussi à une ville ! Ce qu'on récupérera servira à des aménagements supplémentaires pour toute la population... Et puis les Marseillais qui veulent jouer, aujourd'hui, vous croyez que c'est parce qu'il n'y a pas de casino ici qu'ils ne le font pas ? Allez, allons de l'avant..."
Sébastien Barles (Europe Écologie Les Verts)
NON
"J'y suis profondément opposé pour trois raisons, dont la principale est une question de morale. En effet, ce casino ferait office de grande lessiveuse d'argent sale dans une ville déjà gangrenée par l'affairisme, l'économie souterraine, les trafics... On ne pourra jamais savoir d'où vient l'argent joué et blanchi légalement aux tables... C'est en plus un mauvais signal à envoyer à la jeunesse, notamment à celle des quartiers. De plus, cela participe à une vision du développement de la ville qui consiste à mettre le paquet sur le tourisme de luxe, l'hôtellerie de luxe, y compris dans le quartier Noailles...
Cette vision, je n'y crois pas. Elle ne marche pas. C'est un leurre. C'est un peu comme quand on chante à longueur de journée une ode aux croisiéristes pour remplir ces lieux, alors que chacun sait que ce n'est pas un public friqué. Sans parler de la santé économique des casinos, qui n'est pas top en ce moment... Les retombées sont donc totalement hasardeuses. On aurait un levier financier beaucoup plus important en développant l'écotourisme. C'est cela que cherchent les gens qui sont attirés par Marseille ! Ce sont les plongeurs, les randonneurs, les calanques...
C'est l'attrait lié à notre patrimoine naturel ! On le voit bien avec ce qui a le mieux marché en 2013, des projets comme le GR 2013 (parcours de randonnée) que les Marseillais se sont appropriés. Je suis persuadé qu'on peut générer d'énormes ressources, un gisement phénoménal, avec tout ce qui concerne les énergies alternatives, l'éolien, le photovoltaïque... En utilisant le foncier du Port pour générer de l'emploi. Enfin, le dernier argument, c'est l'aspect social. Un casino dans une ville comme Marseille c'est un vecteur d'exploitation de la pauvreté. On sait très bien que les joueurs qui vont au casino sont pour la plupart des chômeurs. On est dans le marché à l'illusion. Ce serait imposer une sorte de taxe sur la misère dans une ville qui est déjà atomisée."
(source : laprovence.com/Laurent d'Ancona)