Face aux reproches émis par la Ville, notamment quant à la qualité de la restauration et aux animations du casino, le propriétaire des lieux Abel Djebbar est radical.
Propos recueillis par Caroline Ansart
La Ville met la pression au casino (lire par ailleurs, et notre édition du 19 novembre). Abel Djebbar, nouvel actionnaire depuis juin, se dit prêt à mettre la clé sous la porte si la mairie ne le laisse pas gérer le casino, à cause de «futilités».
La mairie vous reproche la qualité de la restauration et le manque d'animations, que répondez-vous ?
Pour les animations, on a respecté le cahier des charges à la lettre. On en a la preuve avec les flyers de juin, juillet, août, septembre, octobre. Concernant la restauration, on est arrivé en pleine saison. Les plannings avaient déjà été faits par les anciens propriétaires qui avaient fait l'erreur d'accorder des vacances. En plus, on a eu énormément d'arrêts maladie. On a fait avec les moyens du bord.
C'est ce que vous avez expliqué dans votre réponse à la mise en demeure de juillet. Vous vous y engagiez aussi à ce que tout soit rentré dans l'ordre mi-août. Or, la mairie dit avoir reçu de nouvelles plaintes sur la qualité de la restauration à la rentrée…
Les plaintes viennent de deux personnes ou de leur entourage. Une qu'on a licenciée, l'autre qui est encore employée. Ils ont fait des lettres anonymes à la mairie, et même à la police des jeux. Nous, au contraire, on a eu des félicitations que vous pouvez lire sur Internet qui disent qu'il y a la qualité et qu'en plus, c'est pas cher ! On ne peut pas demander de donner du foie gras dans un repas à 9e, avec plat du jour et entrée ou dessert. C'est le même prix que le kebab du coin !
Ce sont de graves accusations, qu'est-ce qui les motiverait?
Parce qu'ils n'aiment pas notre politique. Parce qu'on leur a retiré leur pouvoir, en leur retirant les carnets d'invitation. A notre arrivée, le restaurant perdait 18 000 e par mois. Parce que tout le monde faisait ce qu'il voulait, n'importe qui commandait. On faisait des soirées avec 80 personnes, mais où seules dix payaient. Des gens abusaient du casino pour faire venir des amis ou de la famille. Je ne peux pas accepter ça. C'est fini. Alors, on a moins de monde mais on n'a plus de perte.
Les reproches ne seraient donc pas fondés?
Tout ce que la mairie nous reproche est nul. Elle veut quoi, un casino ouvert ou un casino fermé ? Avec les machines, j'ai investi 1,2 Me et on vient m'embêter avec ces foutaises ? Je ne suis pas venu à Grasse pour me faire des ennemis ou pour me faire insulter ou critiquer. Je suis venu pour investir de l'argent, pour sauver le casino et les emplois.
Comment se porte le casino aujourd'hui ?
Si on n'était pas venu, il n'existerait plus. Je peux être fier de ce que j'ai fait. En cinq mois, le chiffre d'affaires des jeux a augmenté de 15,48 %. On est peut-être le seul casino de la région avec un tel chiffre.
Le restaurant perd-il toujours de l'argent?
Oui, encore 15.000 € par mois. On a changé le personnel de service, le chef de rang. Et le chef cuisinier depuis octobre, qui travaille des produits frais, pas tout préparés comme avant. Je pense que l'été prochain, on gagnera de l'argent.
Légalement vous étiez aussi tenu d'informer la commune des mouvements de personnel. Pourquoi ne l'avez-vous pas fait ?
Peut être qu'on n'a pas pris l'importance de ça. Mais moi aussi j'ai un reproche à faire à la mairie : ça fait six mois que j'attends sa réponse pour pouvoir créer une porte dans la cloison entre la salle de restaurant et le casino.
Vous n'allez rien changer, même si vous risquez de perdre votre autorisation d'exploitation de jeux ?
Qu'ils ne renouvellent pas ! On s'en fout. Moi j'économiserais de l'argent. Je ne mettrais plus entre 60 et 75 000 e par mois. Le casino fermera. Il y a 28 emplois en jeu. C'est pas moi qui trinquerais, j'ai d'autres investissements ailleurs. Je n'accepte pas d'être une vache à lait, de n'être qu'un investisseur. Si la mairie n'est pas contente, je suis prêt à partir. Si j'ai pas l'autorisation d'ouvrir ma cloison ou si on ne me laisse pas faire mes licenciements et gérer le casino comme je l'entends, je m'en vais. Mardi, je suis convoqué devant la Commission supérieure des jeux à Paris, je leur dirai la même chose.
Vous payez beaucoup à la Ville?
Un loyer d'environ 100.000 € par an. Et un peu plus de 10 % des bénéfices des jeux. Plus ce qu'on leur donne pour les animations culturelles, comme la Jasminade.
Ne licenciez-vous pas trop?
On est ouvert 15 heures par jour et on a entre 40 et 60 entrées. Ça veut dire qu'on paie les gens pour 3 ou 4 joueurs par heure. À Lamalou (casino dans l'Hérault dont Abel Djebbar sera propriétaire à la fin de l'année) le chiffre d'affaires est d'1,2 Me net pour 12 employés. Chez nous, c'est 1,4 M€ net pour 26 employés.
(source : nicematin.com/ Caroline Ansart)