Neuf millions et trois cent mille euros. C’était la somme réclamée par le casinotier, le groupe Lucien Barrière, à la suite de la rupture du contrat de délégation de service public qui liait la Ville de Briançon au casino. Une somme que le maire de la ville, Gérard Fromm, a toujours contestée au motif, il le rappelle encore aujourd’hui, « qu’à aucun moment, il n’y a eu d’interruption du service du casino. Il est toujours resté ouvert ».
Par un arrêt rendu le 24 mars, le Conseil d’État a considéré qu’aucun des arguments du casinotier n’était de nature à permettre l’admission du pourvoi par lequel celui-ci demandait l’annulation de l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille du 28 mars 2013.
Par cette décision, le Conseil d’État donne donc raison à la commune de Briançon et met un terme à la menace qui pesait sur elle de devoir payer 9,3 millions d’euros au casinotier.
La Société d’expansion touristique de Briançon (SETB) a désormais épuisé les voies de recours dans cette instance.
Et maintenant, la cour européenne des Droits de l’Homme ?
Cette décision de justice marque donc une étape décisive pour la Ville de Briançon dans le contentieux du Casino. Gérard Fromm s’en dit « très heureux. Parce que c’est la preuve que Briançon n’est pas redevable d’une dette qui a été inventée de toute pièce par le casinotier ».
Le Conseil d’État ne donne pas de possibilité de recours au casinotier. Celui-ci dispose toutefois de la voie régulière des recours et pourrait se tourner vers la cour européenne des Droits de l’Homme. « Ça relèverait du harcèlement », estime Gérard Fromm.
Pour autant, le maire de Briançon ne se fait que peu d’illusion. « J’imagine que le groupe Barrière va trouver d’autres solutions pour arriver à ses fins. D’autres contentieux courent au sujet de la propriété du bâtiment et de la fiscalité de l’établissement. Mais il est vrai que le recours portant sur les 9,3 millions d’euros était vraiment le très gros morceau. »
Pour rappel, la Ville en est arrivée à “devoir” cette somme d’argent du fait de l’histoire mouvementée de la délégation de service public.
Un premier contrat est signé en 1999. Attaqué, il est remis en cause en mars 2007 par la Cour administrative d’appel de Marseille qui estime que le maire, Alain Bayrou, n’avait pas le droit de « poursuivre les négociations » avec le casinotier car « le cahier des charges est substantiellement différent du projet initial » de 1999.
Quand une nouvelle délégation de service public est lancée, elle prévoit un droit d’entrée de 9,3 millions d’euros. Le délégataire, de son côté, attend des indemnités du même montant, inscrites dans le protocole d’accord à l’amiable. « Pour cette délégation, il n’y a qu’un candidat », se souvient Nicole Gallice, juriste de la mairie. « Le groupe Barrière, qui exploite le casino depuis le début. En juillet 2009, quand les élections sont annulées, il revient sur sa position et décide de ne pas présenter d’offre. » Fin janvier 2010, la convention de gestion temporaire arrive à son terme et il n’y a toujours pas de délégation de service public. Une nouvelle procédure est lancée. Elle doit aboutir avant la fin du mois de septembre.
« Le candidat unique à cette délégation demande alors que les 9,3 millions d’euros de droit d’entrée soient retirés. Il est en position de force. C’est ça ou l’on ferme le casino et on met tout le monde au chômage », relève Nicole Gallice.
Dans l’intervalle, en mai 2010, le groupe a demandé à la chambre régionale des comptes l’inscription des 9,3 millions du protocole au budget de la Ville. La chambre ne lui donnera pas raison.
(source : ledauphine.com/Olivier BUTEUX)