Les deux projets de casinos censés relancer l'emploi à Madrid et Barcelone risquent de ne jamais voir le jour.
Rien ne va plus. Ce devait être les deux grands projets capables de dynamiser la région de Madrid, la Catalogne, voire, par effet d'entraînement, l'Espagne tout entière. Deux entreprises pharaoniques qui devaient à la fois relancer le BTP, le moteur du miracle espagnol aujourd'hui en panne, et doper le tourisme, la dernière machine encore en marche d'une économie atone. Las, les deux complexes de casinos, l'un dans la banlieue de Madrid, l'autre près de Barcelone, accusent de sérieux retards à l'allumage, qui menacent leur avenir.
Madrid, d'abord. Un méga-casino est censé s'installer à Alcorcon, une commune limitrophe de la capitale. Un projet colossal: 17 milliards d'euros d'investissement, 164.000 emplois directs et 97.000 indirects, promettent ses promoteurs. Une activité frénétique, fruit de six casinos, 36.000 chambres d'hôtel, trois terrains de golf et un auditorium de 15.000 places. La presse a trouvé un nom à la mesure de ce qui doit être le plus grand complexe de jeu du Vieux Continent: «Eurovegas».
Concurrence de Tokyo
Seulement voilà, l'entreprise à l'origine de l'initiative, Las Vegas Sands, et son milliardaire de propriétaire, Sheldon Adelson, ont adressé une très longue liste de modifications légales et fiscales aux pouvoirs publics. Parmi elles, une demande particulièrement délicate: pouvoir fumer dans les casinos, ce qui est parfaitement interdit dans tous les lieux publics couverts d'Espagne.
Pour certains analystes, pourtant, le débat sur la cigarette n'est qu'un rideau de fumée. Le véritable problème de Las Vegas Sands concernerait le financement. Selon Deutsche Bank, Adelson, qui s'est engagé à apporter 35% des fonds en capitaux propres, peine à trouver les 65% restant. «À notre avis, tranchent les analystes, l'idée est improbable en Espagne.» JP Morgan avertit quant à elle que le projet «peut finir par être archivé».
Sans compter sur une nouvelle concurrence: la concession des Jeux olympiques de 2020 à Tokyo pourrait conduire le japon à faciliter l'installation de casinos dans le pays pour doper la construction de complexes hôteliers… Et Madrid passerait après le juteux marché japonais.
À Barcelone, le problème est directement politique. Le complexe BCN World doit être construit sur les communes de Salou et Vila-Seca, à 45 minutes de la capitale catalane. Les promoteurs veulent investir 4,7 milliards d'euros et font miroiter 40.000 emplois, directs pour la moitié.
La semaine dernière, toutefois, le président du projet a lancé un avertissement, quelques jours après une importante mobilisation indépendantiste. Les investisseurs n'ont rien contre une Catalogne indépendante de l'Espagne, a précisé Xavier Adsera, en revanche ils retireront tous leurs engagements si l'hypothétique État catalan doit sortir de l'Union européenne. Or, quelques jours avant, plusieurs responsables communautaires ont déclaré qu'en cas de sécession d'un État membre, le nouvel État souverain devrait négocier un nouveau processus d'adhésion.
(source : lefigaro.fr/Mathieu de Taillac)