SYDnEY — Pour lutter contre la dépendance au jeu, en Australie, les joueurs sont encouragés à fixer en début de partie la somme qu'ils ne dépasseront pas, une barrière bien dérisoire selon les associations qui soulignent l'omniprésence des machines à sous dans les pubs et les clubs.
Le pays compte quelque 200.000 machines à sous électroniques et 600.000 Australiens (sur une population de 23 millions) y jouent au moins une fois par semaine, selon un rapport gouvernemental publié en 2010.
C'est surtout un noyau de joueurs qui n'arrive pas à s'auto-contrôler qui inquiète le gouvernement. 15% des joueurs réguliers représentent à eux seuls 40% de la totalité des sommes dépensées.
Pour éviter les dérapages, le gouvernement encourage tous les joueurs à se fixer une somme limite avant d'actionner le bandit-manchot, selon une loi adoptée fin 2012, qui repose dans un premier temps sur le volontariat.
D'ici fin 2014, les fabricants doivent installer la technologie nécessaire sur toutes les nouvelles machines. Des avertissements apparaîtront régulièrement sur les écrans: "Depuis combien de temps jouez-vous?", "n'avez-vous pas dépensé plus que votre limite?".
Les distributeurs automatiques installés dans les clubs les plus importants vont limiter les retraits quotidiens à 250 dollars australiens (197 euros).
"La réalité, c'est que l'Etat joue de plus en plus le rôle d'une nounou" qui materne les gens comme des enfants, grommelle Peter Bell, un retraité qui joue régulièrement sur les machines à sous. "Mais je dépense beaucoup plus sur les champs de course que sur les machines", ajoute ce septuagénaire.
Pour les associations qui luttent contre la dépendance au jeu, cette loi est un cautère sur une jambe de bois.
"On pense qu'elle ne sert quasiment à rien", déclare Erin McMallum, de l'association Getup!.
L'association milite pour une mise d'un dollar maximum, ce qui limiterait les pertes potentielles à 120 USD par heure. Il est facile de perdre 1.500 dollars en une heure sur une machine à poker.
"Les gens ne se restreignent pas eux-mêmes. La moitié du temps, ils ne réalisent même pas qu'ils sont en difficulté", explique Mme McMallum, expliquant que des gens perdent leur logement, détruisent leur famille à cause du jeu, qui pousse certains au suicide.
"L'Australie a un problème très spécifique avec la dépendance au jeu, notamment avec les machines de poker", dit la jeune femme. "Ici, on peut perdre beaucoup plus qu'ailleurs et les machines sont partout, dans tous les clubs, les bars et les casinos. Elles sont difficiles à éviter si vous êtes accro".
Les clubs sont des lieux de rencontre et de détente très populaires en Australie, dont la moitié des habit
ants --surtout les retraités-- détient une carte de membre.
Sans surprise, ces clubs montrent peu d'enthousiasme pour une loi destinée à diminuer les recettes des machines à sous, et donc les leurs. Anthony Ball, directeur de Clubs Australia, s'attend à ce que peu de joueurs choisissent de limiter volontairement leurs mises.
"Il faut se souvenir que les gens jouent sur les machines à poker pour la même raison qu'ils jouent aux courses ou à la lotterie. Ils veulent gagner. C'est un sentiment de liberté. C'est leur récréation", déclare-t-il.
Les gens adorent parier dans cette région du globe, affirme-t-il encore. "C'est ancré dans la culture australienne".
Il dit notamment regretter qu'avec cette loi, aussi peu coercitive soit-elle, le gouvernement fédéral "se mêle pour la première fois de la règlementation des machines à poker".
Modifier les machines pour qu'elles lancent leurs avertissements aux joueurs "ne fera pas de miracle" auprès des drogués du jeu selon lui, persuadé que va échouer l'expérience-pilote menée dans la région de Canberra (sud), où fixer une limite à la somme dépensée sur la journée sera obligatoire.
"Ca n'aidera pas les gens. On ne donne pas à un accro un jeu auquel jouer, ça ne marche pas. C'est comme donner des tickets pour boire à un alcoolique", selon le responsable de Clubs Australia.
(source : google.com/AFP)