Malgré une réduction de ses effectifs de 400 à 250 personnes, le Casino de Bruxelles accumule toujours les pertes. Une situation financière qui inquiète de plus en plus la Commission des Jeux de Hasard. Le gendarme du secteur a donné jusqu’au 7 novembre à l’actionnaire autrichien pour recapitaliser sa filiale belge sans quoi elle entamera la procédure du retrait de la licence d’exploitation.
Rien ne va plus. A l’instar des quatre casinos wallons (Namur, Dinant, Spa et Chaudfontaine) qui ont vu leurs recettes plonger depuis la loi sur l’interdiction de fumer au 1er juillet 2011, le Casino de Bruxelles rebaptisé Viage depuis sa réouverture dans le nouveau centre Anspach, connaît de grosses difficultés financières. Il affiche un niveau de pertes cumulées de 80 millions d’euros. Pour stopper l’hémorragie, la société dont l’actionnaire est Casino Austria International (un poids-lourd du secteur) a dû se résoudre à fermer sa salle de spectacle et son restaurant panoramique pour se concentrer sur ses salles de jeux. «De 400 personnes au 1er janvier 2011, nos effectifs ont été ramenés à 250 aujourd’hui, précise Pierre Stuyck, le directeur financier de Viage. L’an dernier, la perte nette était encore de 10,5 millions d’euros. Grâce à ces mesures, nous avons arrêté l’hémorragie : nous tablons sur une perte réduite à 2 millions d’euros cette année.»
D’après le responsable de l’établissement, malgré l’interdiction de fumer dans les casinos, le nombre de visiteurs est resté relativement stable (près d’un millier par jour) mais les joueurs passent désormais plus de temps dans les fumoirs que devant les tables de jeu ou les machines à sous. Résultat : «nos revenus se situent toujours entre 15 à 20 % en dessous du niveau que nous avions avant l’entrée en vigueur de la nouvelle loi anti-tabac.» Et Pierre Stuyck d’espérer que les choses changent suite à la note que la Commission des Jeux de hasard a rédigée. Celle-ci propose une révision de la loi anti-tabac pour permettre aux casinos de survivre dans un marché de plus en plus dominés par les opérateurs internet et les autres salles de jeu.
Mais il y a d’autres facteurs qui expliquent le petit fiasco de ce projet inauguré en grande pompe, au printemps 2010, les taxes payées à la Ville de Bruxelles et à la Région bruxelloises qui représentent 44 % du chiffre d’affaires du casino (Ndlr, quelque 40 millions d’euros) auxquelles il faut ajouter un loyer exorbitant. Et Pierre Stuyck de pointer du doigt les autorités: «Dans certains pays limitrophes, des mesures ont été prises. Aux Pays-Bas, le niveau de taxation a été ramené de 41 à 29 % et la France a prévu un abattement fiscal de 25 %.» L’exploitant voudrait aussi que la Ville de Bruxelles reprenne à son compte ou trouve un autre locataire pour la Salle de la Madeleine (qui abritait le Casino de Bruxelles avant son déménagement). «Cela nous coûte 800.000 euros par an alors que cette salle est vide», poursuit-il. Sans oublier des erreurs de gestion. «Au moment de négocier, a reconnu Mark Banks, le directeur de Viage, dans une interview accordée à La Dernière Heure, nous n’avons pas su bien jauger le marché que représentait Bruxelles. Nous avons pris le modèle d’Amsterdam; or, Bruxelles n’est pas Amsterdam. Du coup, tous les investissements, calculs de taxes et loyers ont été calculés en fonction. Et dans ces conditions, il est absolument impossible de faire un quelconque bénéfice ici.”
Quoi qu’il en soit, les problèmes de solvabilité du Casino de Bruxelles inquiètent de plus en plus la Commission des Jeux de Hasard. Le gendarme du secteur a envoyé, a-t-on appris, une lettre aux responsables de l’établissement en lui donnant jusqu’au 7 novembre pour présenter des mesures concrètes. Celles-ci devraient inclure une recapitalisation de Viage par son actionnaire autrichien qui a la concession jusqu’en 2020. Dans le cas contraire, La Commission entamera la procédure de retrait de la licence. «Notre volonté est d’atteindre un ebitda positif en 2013», assure Pierre Stuyck.
(source : levif.be/Sandrine Vandendooren)