CENSURE — Pour empêcher les internautes suisses de jouer dans des casinos basés à l’étranger, la Commission fédérale des maisons de jeu imagine une solution radicale: bloquer certaines adresses Internet.
Des membres de la Commission fédérale des maisons de jeu (CFMJ) ont discrètement rencontré mardi à Berne des représentants de l’Association suisse des télécommunications (ASUT) qui regroupe les principaux fournisseurs d’accès Internet du pays. A l’ordre du jour, la présentation d’une solution qui empêcherait techniquement les internautes suisses de se connecter à des sites de jeu en ligne basés à l’étranger. Et pour cela, la CFMJ envisage ni plus ni moins de demander à tous les fournisseurs d’accès internet du pays de bloque l’accès à certaines adresses Web (URL) ou adresses IP.
En suisse, l’exploitation d’un casino en ligne n’est pas autorisée. En revanche, rien n’interdit au consommateur helvétique de se connecter sur des sites basés à l’étranger, à ses risques et périls. Comment la CFMJ peut-elle envisager de censurer un comportement qui n’est pas punissable par la loi? «Il ne s’agit pas de punir les joueurs, mais de les protéger des offres de jeux de hasard d’argent qui ne permettent pas de garantir une exploitation des jeux sûre et transparente, une protection contre la criminalité économique et le blanchiment d’argent, et une prévention efficace des conséquences socialement dommageables du jeu», justifie le directeur de la CFMJ, Jean-Marie Jordan.
Censure inacceptable
Et comment cette idée est-elle reçue par les fournisseurs d’accès Internet? Pour le moins froidement: «Disons que l’ASUT n’est ni enthousiaste, ni heureuse à l’idée de devoir bloquer des adresses, répond la directrice Vania Kohli. Cette solution n’est pas, selon nous, une réponse appropriée et nous nous y opposons.»
Un avis partagé par les défenseurs des libertés sur Internet. «Le fait même que l’on puisse, en 2012, penser une seconde à censurer une partie d’Internet est totalement inacceptable, s’énerve Pascal Gloor, vice-président du Parti pirate suisse. Sans compter que c’est techniquement irréaliste. La censure, c’est pour les dictatures!»
Aucune décision formelle n’a été prise au terme de la réunion de mardi. Le groupe de travail dirigé par la CFMJ, qui planche sur cette question depuis de longues années, doit soumettre cet automne des propositions qui serviront de base pour modifier la loi.
(source : lematin.ch/Alexandre Haederli)