Alors que les Suisses s’apprêtent à voter sur les jeux d’argent, les Zurichois obtiennent enfin leur maison de jeux, après vingt ans d’atermoiements.
On ne peut décemment pas pavoiser comme ville la plus chère du monde – selon le dernier classement de The Economist – et faire l’impasse sur un temple du jeu d’argent. Comment, Zurich n’a pas de casino? Cette entorse au standing d’un grand train de vie sera bientôt réparée. En novembre, un casino haut de gamme ouvrira sur les bords de la Sihl.
C’est une vieille histoire qui se dénoue. Au début des années 90, le canton nageait à contrecourant. Alors que les Suisses avaient plébiscité en 1993 la levée de l’interdiction des casinos, les Zurichois avaient voté en 1991 le bannissement des machines à sous. Des milliers d’automates avaient été évacués des salles de jeux qui quadrillaient le canton, avec une densité parmi les plus fortes du monde.
Ce climat suspicieux face aux jeux d’argent a tout gelé. En 2001, lorsque la Confédération distribuait les concessions qui feraient surgir vingt et une maisons de jeux, Zurich a été laissée sur le carreau. Une amère leçon d’humilité que de voir Courrendlin, Pfäffikon ou Mendrisio en décrocher une. «Que, sur tout le canton de Zurich, pas un seul projet ne soit retenu a surpris tout le monde», se souvient Martin Vogel, porte-parole de Swiss Casinos qui a obtenu la nouvelle concession. A l’époque, sa société avait présenté plusieurs projets, à l’aéroport et à la Maison des congrès notamment. En les rejetant, la Confédération aurait tenu à respecter le scepticisme des citoyens.
La deuxième vie de l’Ober. Aujourd’hui, Zurich saute dans le train en marche. «La Confédération a décidé d’accorder de nouvelles concessions car les rentrées d’impôt des casinos étaient en baisse», explique Marc Friedrich, directeur de la Fédération suisse des casinos. En effet, après le pic de 2007 à 539 millions de francs, l’imposition ne cesse de chuter, à 453 millions en 2010.
Des jeux d’argent dépend la santé financière de plus d’une institution. L’AVS, d’abord, avale la part du lion de l’impôt sur les casinos. Les cantons d’accueil touchent 40% de celui des concessions B, c’està- dire des salles de jeux plus restreintes. Et d’innombrables associations culturelles, sportives et sociales vivent sous la perfusion des gains nets de la Loterie romande et de Swisslos.
Manière de laver son honneur, Zurich planifie le plus grand casino de Suisse: deux étages de jeux, plus un de divertissement tout public et un de restauration. Au rez, étrangement, le magasin Athleticum perdurera. Le tout à cinq minutes de la gare.
La bâtisse, c’est l’atout charme du casino. Bloc de béton surplombant la Sihl, la maison Ober incarne l’identité industrielle brute de Zurich. Cet ancien grand magasin reste dans la mémoire des générations âgées, visible à la ronde par l’indéboulonnable «OBER» sur le toit. «La pancarte est protégée par le patrimoine et, de toute façon, nous l’aurions gardée», rassure Martin Vogel. Pas sûr que cela parle aux 16 millions de visiteurs furtifs et aux 4 millions de touristes annuels que cible le casino. Mais faire revivre l’Ober permettra peutêtre aux Zurichois de se réconcilier avec les jeux d’argent.
VOTATIOnS FEDERALES
Jeux d'argent à l'intérêt public
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(source : hebdo.ch/Tasha Rumley)