PARIS — Bandits manchots, Rapido, chevaux: 600.000 personnes (1,3% de la population) sont touchées par l'addiction aux jeux d'argent et de hasard, une pathologie souvent liée à une dépendance à l'alcool, au tabac ou au cannabis, révèle la première enquête menée en France sur ce sujet.
Cette enquête, réalisée avant l'ouverture du marché français des jeux en ligne en juin 2010, a été conduite par l'observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) et l'institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpes) dans le cadre du Baromètre santé 2010.
Les questions sur le jeu ont d'abord été posées aux 25.034 personnes de l'échantillon (18 à 75 ans), afin de déterminer le nombre de joueurs misant au moins une fois dans l'année. Dans un second temps, seuls les joueurs les plus actifs (jouant au moins 52 fois/an ou misant au moins 500 euros/an) ont été interrogés.
Les jeux concernés sont ceux de tirage (Loto, Euro Millions ...), de grattage (Cash, Millionnaire ...), Rapido, PMU, paris sportifs, machines à sous et poker (casinos) et les jeux sur internet.
Les enquêteurs ont utilisé l'outil de repérage du jeu "problématique", dit "indice canadien du jeu excessif" (ICJE), utilisé dans plusieurs autres enquêtes internationales. Cet indice permet de calculer, parmi les joueurs actifs, la proportion de joueurs à "risque modéré" (susceptibles de se trouver en difficulté en jouant) et de joueurs "excessifs" (susceptibles d'être en grande difficulté).
A partir des réponses aux neuf questions du test ICJE des joueurs actifs, les enquêteurs ont pu calculer le nombre de joueurs à "risque modéré" et de joueurs "excessifs" (formant ensemble le groupe des "joueurs problématiques"). Au total, pour l'ensemble de la population française, ils estiment que 0,9% (400.000 personnes) présentent un "risque modéré" et que 0,4% sont des joueurs "excessifs" (200.000 personnes), soit 1,3% de joueurs "problématiques" en France.
Cette enquête relève notamment que les joueurs "excessifs" sont encore plus souvent des hommes que les joueurs actifs (75,5% contre 62,7%), sont également plus jeunes (41 ans, contre 47 ans) et qu'ils misent davantage: près de la moitié (47% des joueurs "excessifs") dépensent plus de 1.500 euros par an contre 7,1% pour l'ensemble des joueurs actifs.
Par ailleurs, l'enquête fait apparaître que les consommations d'alcool, de tabac et de cannabis "les plus à risque ou les plus intensives" sont davantage retrouvées chez les joueurs "excessifs" que parmi l?ensemble des joueurs "actifs" ou la population générale. Ainsi, chez les joueurs "excessifs", 26,3% ont un risque de dépendance à l?alcool (3,2% de la population générale), 64,2% fument quotidiennement (29,7%) et 6,1% déclarent avoir consommé du cannabis au cours du dernier mois (4,4%).
Pour autant, relèvent les auteurs de l'étude, avec une prévalence totale de 1,3% pour le jeu "problématique", la France se situe loin derrière les Etats-Unis ou l'australie (autour de 5%) et légèrement derrière l'Italie, le Canada, la Belgique et la Grande-Bretagne (alentours de 2%).
Cette enquête sera examinée avec le plus soin par le gouvernement qui doit répondre cet automne aux opérateurs de jeux en ligne qui demandent notamment une réforme fiscale du dispositif de la loi sur l'ouverture afin de rendre paris sportifs et hippiques et poker en ligne "plus attractifs".
En 2010, selon une enquête de l'AFP, les Français ont misé 26,3 milliards d'euros aux jeux d'argent et de hasard, en augmentation de 22% par rapport à 2009 (21,6 milliards).
(source : google.com/AFP/Pierre-Marie GIRAUD)