La Commission fédérale des maisons de jeu va sévir contre la mode des tournois illégaux.
Le Tribunal fédéral a brutalement mis fin à la vogue des tournois de poker au mois de mai dernier. Seuls les casinos peuvent désormais proposer ces tournois, mais l’offre clandestine s’est développée. Jusqu’ici, l’autorité de contrôle s’est montrée plutôt discrète. Mais cela va changer, comme le confirme au «Matin» Jean-Marie Jordan, directeur de la Commission fédérale des maisons de jeu (CFMJ): «Il n’y a pas de chasse aux sorcières, nous faisons preuve de retenue dans la répression, mais il est de notre devoir de faire des contrôles, opérés après dénonciation.»
Le plus souvent, des joueurs fâchés ou des cafetiers concurrents balancent des informations à la CFMJ. «Jusqu’ici, trois contrôles d’une certaine envergure ont eu lieu. D’autres devraient vraisemblablement suivre», indique Jean-Marie Jordan. Pour l’heure, ces contrôles ont frappé la Suisse alémanique. La Suisse romande va suivre. D’après nos informations, des dénonciations sont aussi arrivées de côté-ci de la Sarine.
Les organisateurs de tournois qui dépassent le cadre familial ou amical ont donc intérêt à faire attention. Et la CFMJ ne plaisante pas lorsqu’elle mandate la police pour opérer un contrôle. Vendredi dernier, une cinquantaine d’amateurs de Texas Hold’em en ont fait l’expérience à Köniz, dans la banlieue bernoise. Plus de trente gendarmes ont débarqué dans le local d’un établissement public et demandé aux joueurs de lever les mains en l’air avant de tous les menotter.
Seuls les organisateurs sont poursuivis
Chacun a été interrogé puis relâché, sachant que la participation à un tournoi illégal n’est pas sanctionnée. «Il faut rappeler aux gens que seuls les organisateurs de tournois illégaux peuvent être poursuivis. Les participants, eux, ne risquent rien sur le plan pénal. Le même principe s’applique sur Internet.»
Même si le citoyen de base n’est pas visé, cette nouvelle traque aux tournois de poker passe mal auprès de nombreux élus fédéraux. Hier encore, le Conseil des Etats a eu un bref débat à ce sujet. Sans prendre encore de décision, les sénateurs ont exprimé «une certaine sympathie» à l’égard de motions qui visent à ce que des tournois de poker puissent de nouveau être organisés hors des casinos.
L’UDC vaudois Jean-Pierre Grin a par exemple déposé un texte qui demande que la CFMJ puisse délivrer des licences allégées aux organisateurs de tournois de poker où la mise est limitée. Une telle révision de la loi risque toutefois d’être longue et incertaine. Le sénateur Luc Recordon (Verts/VD) préfère ainsi s’engager pour que la notion de jeu dans la sphère privée soit appliquée de manière assez large: «On pourrait imaginer une ordonnance qui limite les tournois privés à une vingtaine de personnes et les mises à 200 francs.» Jean-Marie Jordan, lui, ne croit pas à la nécessité de nouvelles lois: «Il est préférable de juger au cas par cas. La marge de manœuvre reste suffisante pour les tournois dans un cadre privé.»
(source : lematin.ch/Ludovic Rocchi)