Seul le poker bénéficie pleinement de l’ouverture à la concurrence des jeux d’argent en ligne. Les paris sportifs pâtissent d’une offre illégale plus avantageuse.
«Il est plus facile de gagner le jackpot à la loterie que sur les marchés cotés des jeux en ligne, très ouverts, très concurrentiels et très taxés. » Lors d’un séminaire organisé par CM-CIC Securities, Christian Auzanneau, analyste de la filiale investissement du Crédit Mutuel, n’a guère incité ses clients à faire tapis au profit des sociétés de jeux. Il prédit d’ailleurs une concentration du secteur en France, où opèrent 32 entreprises.
Depuis la loi du 12 mai 2010, qui a mis fin aux monopoles du PMU et de la Française des jeux, des sociétés qui exerçaient depuis l’étranger ont été légalisées, comme Zeturf ou betclic, désormais n°1 des paris sportifs (46 % du marché, 1 million de clients). Le poker a aussitôt tiré son épingle du jeu, avec des mises plus élevées que prévues, à 2,4 milliards d’euros et un potentiel estimé à 6 milliards. Christian Auzanneau est moins optimiste : « En Europe du Nord, le nombre de joueurs a déjà commencé à baisser. On saura vite si l’effet de mode est en train de s’achever. »
Du côté des paris hippiques, l’analyste juge qu’il n’y a « pas de marché en France, où le PMU est indéboulonnable. L’avenir le moins terne appartient sans doute aux paris sportifs, qui bénéficient d’une publicité gratuite et permanente, à savoir le battage médiatique autour des grands événements. »
Pourtant, le coup d’envoi du secteur est poussif : en six mois, et malgré la Coupe du Monde, les Français ont misé 350 millions d’euros, majoritairement sur des matchs de foot, soit « 25 à 40 % de moins qu’espéré », avance Philippe Germond, patron du PMU. A cause d’importants investissements (bookmakers, publicité), cette nouvelle activité du PMU ne sera pas profitable cette année, et doit surtout permettre de fidéliser et rajeunir la clientèle. Bwin, malgré une augmentation de 50 % de ses clients après la régulation, affiche des résultats équivalents à ce qu’ils étaient auparavant, la différence arrivant dans les caisses de l’Etat.
Le niveau des taxes fait d’ailleurs débat : de 7,5 % sur les mises des joueurs, elles représenteraient, après versement des gains, un prélèvement de 60 % sur les revenus des entreprises, affirme Nicolas Béraud, directeur général du groupe betclic Everest. C’est selon lui « 3 à 4 fois plus qu’en Italie ou en Angleterre ». Il fustige aussi la règle française empêchant de reverser plus de 85 % des gains aux joueurs, contre 95 % dans d’autres pays. Cela pousserait, selon lui, les internautes vers des sites étrangers, où ils gagnent davantage, et peuvent également, malgré des risques importants, jouer au casino ou aux loteries, interdits à la concurrence en France. Ces sites “illégaux” représenteraient entre 15 % et 50 % du marché des jeux en ligne, selon les opérateurs.
(source : lejsl.com/Simon Barthélémy)