PARIS, 13 oct 2010 (AFP) Paris sportifs ou hippiques et poker en ligne, machines à sous des casinos, loteries et tickets de grattage provoquent des addictions dans tous les pays mais la mesure de ce phénomène de santé publique n'existe toujours pas en France.
Alors que les Français ont dépensé un milliard d'euros depuis la libéralisation des jeux et des paris en ligne en juin, il faudra attendre six mois pour connaître les résultats de la première étude sur le jeu pathologique dans l'Hexagone.
Selon l'Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), le volet sur le jeu pathologique intégré dans le bilan santé de l'Institut national de la prévention et d'éducation pour la santé (Inpes) sera publié "à la fin du premier trimestre 2011".
30.000 personnes ont été interrogées. L'étude permettra de savoir "combien de personnes sont concernées par le jeu excessif en France", explique-t-on à l'OFDT alors que 21,6 milliards d'euros sont allés en 2009 dans les caisses de La Française des Jeux, du PMU et des 197 casinos français.
Même si elles ne portent pas sur internet, les données sur le jeu pathologique sont très attendues par les spécialistes comme Marc Valleur, directeur de l'hôpital Marmottan.
"Cette mesure du jeu addictif va nous donner une première idée du phénomène", dit-il à l'AFP. Il cite une étude récente au Québec selon laquelle 2 % seulement de la population de la Belle Province joue sur internet mais avec un "pourcentage de joueurs excessifs très élevé".
"Il va donc falloir suivre de très près" le risque du jeu excessif sur internet en France, souligne Marc Valleur. "Il faudra sans doute peser" sur le volume des dépenses publicitaires des opérateurs de jeux en ligne qui ont atteint 100 millions d'euros pour les huit premiers mois de l'année.
La loi autorisant les paris et les jeux en ligne prévoit une "clause de revoyure" 18 mois après sa promulgation. Pour Marc Valleur, le taux de redistribution au joueur (TRJ, fixé par la loi à 85 % pour les paris sportifs et hippiques) est l'un des "rares outils majeurs dont dispose le législateur". Ce taux, que des opérateurs souhaitent revu à la hausse, est l'un des éléments du jeu excessif, selon des spécialistes.
La loi prévoit, par le biais des prélèvements fiscaux, de reverser jusqu'à 10 millions d'euros aux structures spécialisées de soins pour l'addiction. "Il faut maintenir cette priorité", déclare à l'AFP le sénateur François Trucy (UMP, Var), auteur de deux rapports sur les jeux d'argent et de hasard. Cette "addiction est un phénomène qui ne peut être dissociée des autres addictions comme l'alcool, le tabac et les drogues".
Le premier salon des jeux en ligne qui vient de se tenir à Monaco a consacré sept colloques à cette industrie, mais le mot addiction n'a pas été prononcé. Seule allusion, la remise de l'"award du meilleur opérateur responsable" au PMU.
Les opérateurs, FDJ et PMU en tête, ne parlent jamais en effet "d'addiction" mais de "jeu responsable". Ces deux opérateurs, qui multiplient dans leurs points de vente les avertissements sur les dangers du jeu excessif, financent des associations et organismes spécialisés, comme le Centre de référence sur le jeu excessif (CRJE) de Nantes.
Financement qui irrite Jean-Pierre Martignoni, sociologue des jeux, très critique sur la participation de psychologues à la mise au point d'Amigo, le nouveau jeu de la FDJ qui remplacera progressivement le Rapido, l'un des jeux les plus addictifs.
(source : letemps.ch/AFP)