«A Monaco, le way of life devient moins show-off»
BERNARD LAMBERT n'a pas l'habitude de présenter des résultats en baisse. Cette année, la SBM - qui détient le monopole du jeu à Monaco et gère la plupart de ses palaces, restaurants, bars et night-clubs - a été rattrapée par la crise. Il nous explique ce qui a changé au paradis des ultrariches.
Propos recueillis par Bertrand Fraysse pour challenges.fr
Challenges. Vous aviez bien commencé 2008 et vous la terminez avec un chiffre d'affaires en baisse de 13%, à 400 millions d'euros, et un résultat net (40,6 millions), en diminution de 57%. Que s'est-il passé ?
Bernard Lambert. Tout a basculé à partir du 1er novembre. Jusque-là, nous étions en ligne avec l'année précédente, qui était une année record, et même en avance en ce qui concerne l'hôtellerie. Cela s'est passé très vite. Les entreprises américaines ont brutalement annulé les très belles opérations qu'elles avaient prévues, suivies par les britanniques et les autres. Le tourisme d'affaires a chuté d'environ 25%. La clientèle individuelle a tenu bon jusqu'au jour de l'An, mais là aussi, la chute a été importante, de l'ordre de 20 ou 25%.
L'interdiction de fumer dans les casinos monégasques, à partir du 1er novembre, a-t-elle joué ?
Bien sûr. Quelques centaines de clients de la Côte d'Azur ou d'Italie avaient pris l'habitude de venir jouer chez nous pour pouvoir fumer. Mais c'est la crise économique qui explique surtout le recul.
Y a-t-il eu moins de clients, ou bien ceux-ci ont-ils moins dépensé ?
Les deux. Les businessmen qui venaient passer quelques semaines à Monaco, en se contentant de garder un oeil sur leurs affaires, sont restés chez eux. Et ceux qui sont venus ont réduit leurs dépenses. Au lieu d'une bouteille de vin à 3 000 euros, ils en prennent une à 600. Au lieu d'aller au Louis XV d'Alain Ducasse, trois étoiles au Michelin, ils se contentent du Grill de l'Hôtel Hermitage, une étoile seulement.
Cela veut-il dire aussi qu'ils consomment de manière moins ostentatoire ?
Je crois qu'on revient à certaines valeurs. Il y a eu toute une clientèle dont la fortune s'était faite très rapidement et qui dépensait tout aussi vite. On redécouvre le respect de la valeur de l'argent. La consommation devient moins show-off, les marques se font plus discrètes.
Vous vous êtes lancés dans le jeu en ligne en partenariat avec Financière Lov, le holding de Stéphane Courbit.
Pourquoi ne pas y être allé seul ?
Nous avions pris beaucoup d'années de retard et nous n'avions pas le savoir-faire informatique. C'est pourquoi nous avons préféré nous associer à parité avec Financière Lov dans Mangas Gaming, qui contrôle l'opérateur de jeux en ligne Bet-Clic. Avec 1 million de joueurs, Mangas Gaming est déjà numéro trois en Europe.
Vous avez annoncé démarrer votre internationalisation sous la marque monte-carlo SBM : la crise ne remet-elle pas en question vos projets ?
Notre hôtel de Marrakech, au Maroc, ouvrira ses portes en septembre, comme prévu, et nous examinons toujours des possibilités en Europe. Mais la conjoncture n'est pour l'instant guère favorable à d'autres ouvertures.
(source : challenges.fr/Bertrand Fraysse)