En 2002, Stanley Ho perdait son monopole sur les jeux à Macao, après une domination sans partage qui a duré près de quarante ans. Tous lui prédisaient un sombre avenir et un effondrement annoncé sous les coups de boutoir de la concurrence américaine, venue avec armes et bagages du Strip de Las Vegas. Mais l'histoire économique est pleine de certitudes... qui se sont écroulées. Mr Ho nous en donne un brillant exemple.
Las Vegas en Mer de Chine
L'armada américaine n'a pas tardé, avec une multiplication des ouvertures de casinos : Las Vegas Sands (LVS) a ouvert le bal avec le Sands Macau en 2004, deux ans avant que Steve Wynn ne réplique en investissant 1,2 milliard de dollars dans le Wynn Macao. Sheldon Adelson, patron de LVS ne s'en laisse pas compter et lâche 2,4 milliards pour l'hôtel-casino venetian Macao en 2007, pour ajouter dans la foulée un complexe de 6,400 chambres. Enfin, MGM Mirage lançait quelques mois plus tard le MGM Grand Macau pour 1,3 milliard en nouant un partenariat avec Pansy Ho, la propre fille du vénérable Stanley.
La messe était dite : le Strip filerait depuis Las Vegas pour se prolonger au cœur de l'ancienne colonie portugaise et l'empire Ho s'effondrerait en silence. D'ailleurs, tous ces groupes du Nevada s'arrachaient à prix d'or les terrains situés au centre de l'île où ils recréaient la copie conforme du boulevard aux rêves de Las Vegas.
Rien ne vaut l'expérience
Seulement voilà, le vieux Stanley Ho, du haut de ses 87 ans, regardait probablement toute cette agitation avec amusement. Car il disposait encore d'un atout dans son jeu : sa parfaite connaissance des petites habitudes du flambeur chinois.
La majeure partie des 22 millions de visiteurs annuels de l'île y passent en moyenne une journée, puis repartent sur le continent. Et quand ils viennent, c'est pour jouer et rien d'autre.
Plutôt que de se jeter sur des exorbitants terrains centraux, Stanley Ho a judicieusement retenu les emplacements proches des débarcadères du sud de l'île pour installer ses nouveaux casinos. Sans en rajouter dans les « à-côtés » pharaoniques et hôteliers.
Résultat, Stanley Ho a vu sa part de marché progresser de 26% en 2008 à 30% sur le premier trimestre 2009. Dans le même temps - et la crise économique n'y est pas pour rien - les allées de la galerie marchande du Grand Canal (LVS) restaient quasi-désertes et une pauvre poignée de joueurs misaient leurs yuans au casino Four Seasons, toujours propriété de LVS.
Savoir absorber la force de l'adversaire
Mais la sagesse du vieux Ho ne s'arrête pas là. L'homme a su également prendre ce qu'il y avait de potentiellement bon dans la stratégie des nouveaux venus. S'adaptant à une clientèle de masse, moins compulsive que ses anciens joueurs, SJM a ouvert le Grand Lisboa en 2007, suivi il y a peu d'un hôtel adjacent de 400 chambres, reprenant les formules de Las Vegas, avec des espaces clairs et accueillants, loin des tripots enfumés qui ont fait sa fortune.
Et le maître du jeu a fait, là encore, mieux que ses modèles : 40% de ses revenus proviennent de cette consommation de masse, contre seulement 25% en moyenne pour ses concurrents made in US.
Une heureuse configuration stellaire pour SJM : le gouvernement chinois vient de mettre en place des lois répressives envers les citoyens qui viennent sur l'île flamber 100 000 dollars ou plus dans la journée. Autant dire que les nouveaux consommateurs de masse ne sont que très peu concernés...
Que se dit-t-on aux repas de famille des Ho ?
Certes, Stanley Ho n'est pas épargné par la crise. Mais malgré une chute des ventes et des bénéfices, il semble bien armé pour résister à la tempête, alors que les groupes américains sont parfois poussés au bord de la faillite par des dettes mirobolantes.
Et la nouvelle concurrence ne l'effraie pas. L'australien James Packer s'apprête à ouvrir cet été un casino de 2,1 milliards de dollars à Cotai. Dans cette opération, il s'est assuré le partenariat d'un bon connaisseur du secteur... Lawrence Ho, le fils de Stanley.
(source : zonebourse.com)