Le chiffre d’affaires du Casino du Lac, à meyrin, a chuté de 15% durant les mois sans fumée. Son directeur réagit.
En début d’année, le Casino du Lac a touché le jackpot. Grâce à l’interdiction de fumer dans les lieux publics qui frappe la France. Ce qui a poussé vers l’établissement meyrinois les accros du jeu et de la clope venus de la région frontalière. Mais cet été, avec l’entrée en vigueur de la même interdiction à Genève, la donne a complètement changé. «Notre chiffre d’affaires durant les mois de juillet, août et septembre, a chuté d’environ 15%», confirme le directeur général du casino, Yassine Ben Abdessalem.
L’absence de fumeurs explique-t-elle à elle seule ce fléchissement? «Nous sommes dépendants de plusieurs phénomènes, telles la récession ou la baisse du pouvoir d’achat. Les gens, plus prudents, dépensent moins. Cela dit, la diminution de notre chiffre d’affaires durant l’été correspond, pour la même période, à une augmentation des rentrées au Casino de Montreux. Où les fumeurs sont toujours acceptés…»
Embellie en octobre
Pour le directeur, la relation de cause à effet paraît claire. Elle se renforce avec l’embellie qui se dessine déjà pour le mois d’octobre, où l’interdiction de fumer a été levée à Genève. «On note en effet un retour vers la normale depuis le début du mois. On est à moins 2% par rapport à la même période de l’an dernier. Ce n’est donc pas le retour à la croissance, mais c’est comparable à ce que nous avons enregistré en mai et en juin.»
Curieusement, si le chiffre d’affaires a chuté durant les mois «anticlopes», la fréquentation du casino, elle, a diminué dans des proportions bien moindres. «Parce qu’un joueur fumeur ne va pas s’arrêter d’un coup de jouer ou de fumer. En revanche, il va rester moins longtemps au casino, analyse Yassine Ben Abdessalem. De fait, la fréquentation de notre établissement, environ 1000 clients par jour, a baissé d’environ 9% en juillet et septembre. Elle est même restée pratiquement stable en août.» Pourquoi? «Ce mois est atypique, avec la venue de nombreux visiteurs orientaux. Ils ont leurs habitudes ici. Ils jouent d’ailleurs différemment des autres clients. Ainsi, en août, le produit des machines à sous baisse de 15%, celui des tables augmente de 35%.»
Reste que le retour de l’interdiction de fumer à Genève est inévitable. Comment l’appréhende-t-on à meyrin? Au Tessin, où la fumée est aussi interdite dans les lieux publics, le Casino de Lugano a trouvé une parade. Il a investi 3 millions de francs pour aménager un étage entier réservé aux fumeurs. Cet espace de 450 m2 sera équipé d’un système de ventilation perfectionné, où l’air est entièrement renouvelé toutes les huit minutes.
Prêts à créer un fumoir
«La loi tessinoise est moins restrictive que celle de Genève, constate Yassine Ben Abdessalem. Sinon, nous serions prêts à investir, nous aussi, dans un système d’extraction de l’air ou de cloisonnement entre espaces fumeurs et non-fumeurs. Avant l’entrée en vigueur de l’interdiction, nous avions écrit au Conseil d’Etat, lui faisant remarquer que notre établissement n’était pas vraiment public, puisque nous pouvions refuser des clients. Mais nous n’avons pas obtenu gain de cause.» Reste la possibilité de devenir un club privé où fumer pourrait être autorisé: «Mais cela implique une liste de membres très stricte, ce qui semble impossible pour un casino comme le nôtre.»
Alors? «Alors, on est en sursis, lâche Yassine Ben Abdessalem. Si la future législation genevoise est aussi draconienne que le précédent règlement, nous allons perdre 50% de nos bénéfices. Et pas seulement nous, mais aussi les collectivités qui prélèvent des impôts sur notre établissement et nos gains. On sera tous perdants.» Un comble pour un casino!
(source : tdg.ch/XAVIER LAFARGUE)