Pour n'importe quelle destination touristique, accueillir près de 10 millions de visiteurs en un trimestre serait considéré comme un succès. Mais à Las Vegas, ce chiffre en stagnation traduit l'impact de la déprime de l'économie américaine.
La grande ville du Nevada (ouest), célèbre dans le monde entier pour le "Strip", ce boulevard bordé d'excentriques hôtels-casinos géants, avait jusqu'ici la réputation d'être insensible aux fluctuations de la première économie mondiale.
Mais les dernières statistiques publiées en fin de semaine dernière par l'Autorité des congrès et des visiteurs de Las Vegas (LVCVA) montrent que le premier trimestre 2008 a été celui sinon d'une récession, du moins d'une stagnation.
Entre début janvier et fin mars, "la ville du péché" a réalisé 2,9 milliards de dollars de chiffre d'affaires grâce aux congrès, chiffre en baisse de 7,1% par rapport à la même période l'année précédente. Le nombre de congrès a fléchi de 12,6%.
Les revenus du jeu sont en chute de 4,8% en mars et de 3% pour les trois premiers mois de 2008. Et en bourse, l'action de l'entreprise Las Vegas Sands, propriétaire des méga-hotels de luxe "The Venetian" et "The Palazzo", ce dernier ayant ouvert ses portes en décembre, a perdu 38% en six mois.
Le titre du groupe mgm Mirage, qui compte dans son portefeuille huit hôtels-casinos, dont le prestigieux Bellagio, a quant a lui plongé de 42% depuis novembre 2007.
La fréquentation de Las Vegas est en hausse de 0,4% pour 2008, mais les analystes attribuent ce résultat à un jour supplémentaire d'activité en cette année bissextile.
Depuis 1970, Las Vegas n'a vu son activité économique chuter qu'à une seule reprise: après les attentats du 11-Septembre, 2002 a vu les revenus du jeu baisser de 1% par rapport à 2001.
Les autorités de la ville du jeu ont toujours affirmé que les parieurs restaient fidèles, même lors de récessions comme celle de 1992.
Mais aujourd'hui, les machines à sous, tables de poker et autres jeux de hasard ne représentent que 40% du chiffre d'affaires de la ville contre 58% il y a 16 ans.
Le solde est réalisé par des restaurants, des salons de massage, des spectacles et des boîtes de nuit, autant de dépenses de luxe que les Américains sont de moins en moins nombreux à pouvoir s'offrir.
"La situation actuelle est différente des précédentes crises", affirme Bill Lerner, un spécialiste du secteur du jeu pour la Deutsche Bank. "Maintenant qu'il existe beaucoup plus d'activités non liées au jeu à Las Vegas, ce sont ceux qui ne jouent pas qui donnent le la", explique-t-il.
Or, en période difficile, les visiteurs coupent dans les dépenses. Plusieurs congrès annuels ont vu leur nombre de participants décliner. Pour tenter d'enrayer la tendance, les hôtels-casinos ont recours à des soldes et offrent des baisses de 10 dollars voire plus sur leurs tarifs.
Même agressivité en direction des visiteurs réguliers, qui reçoivent dans leurs boîtes aux lettres électroniques des offres de chambres au tiers du prix normal, et des vols à 37 dollars aller depuis San Francisco, en Californie voisine.
Mais les conséquences de ce ralentissement se font déjà ressentir sur le front de l'emploi: mgm Mirage vient de licencier 440 cadres moyens, espérant 75 millions de dollars d'économies par an.
Signe toutefois d'un optimisme sur le long terme, le bâtiment continue à bien se porter. Les projets en cours de réalisation représentent un investissement de 30 milliards de dollars. Le nombre de chambres d'hôtel est censé augmenter de 40.000 unités d'ici à 2011, portant leur total à 176.000. 100.000 emplois devraient ainsi être créés.
(source : 20minutes.fr/AFP)