Le ministère de l'Intérieur envisage de créer une Direction unique du renseignement intérieur, en supprimant la DST et les RG - qui garderont cependant leurs missions-, ouvrant ainsi un chantier cher au président Sarkozy mais qui fait grincer des dents dans la "Grande maison".
Selon des responsables syndicaux policiers, il s'agit d'une "révolution" dans la police qui, pour l'heure, ne rencontre pas d'opposition de leur part, juste de la "vigilance".
Ils reconnaissent que la "base grogne et s'inquiète", notamment parmi les 4.000 policiers des Renseignements généraux (RG) "attachés à leur spécificité et leur culture".
Ce chantier, longtemps resté à l'état de "serpent de mer", selon des spécialistes du renseignement civil français, "quelle que soit la couleur politique du gouvernement", est une volonté affichée par Nicolas Sarkozy lorsqu'il était ministre de l'Intérieur puis candidat à l'Elysée.
L'Intérieur préconise une rupture avec les habitudes. Notamment celles des "coups tordus" et des "barbouzeries" qui ont parfois entaché la réputation des RG, voire de la DST, dans de basses affaires politico-médiatiques, de la mort du pasteur Joseph Doucé à l'affaire Clearstream.
Beauvau envisage la création d'un service unique, la Direction du renseignement intérieur (DRI), un "peu à l'américaine", selon un proche du dossier.
La DRI regrouperait, selon des sources au ministère de l'Intérieur, "ce qui relève de l'intérêt de la Nation": la lutte contre le terrorisme, l'intelligence économique, les courants radicaux.
Les quelque 2.000 policiers de la Direction de la surveillance du territoire (DST, contre-espionnage) et un millier environ des RG, déjà en charge de ces domaines, en feraient partie.
RG et DST devraient de facto disparaître, reconnaît l'Intérieur, mais leurs missions "seront préservées".
La direction des courses et jeux des RG, qui surveille les hippodromes et les casinos, devrait elle rejoindre la police judiciaire.
Reste le gros des troupes qui, aux RG, scrutent les mouvements sociaux ou d'agriculteurs dans les départements, souvent pour le compte des préfets, ce qui leur a valu leur surnom de "grandes oreilles du gouvernement".
Ces 2.000 à 3.000 policiers devraient être répartis dans une "sous-direction de l'information" créée au sein de la Direction centrale de la sécurité publique (DCSP) et regroupant leurs activités traditionnelles.
C'est là que le bât blesse, comme l'ont confirmé sous anonymat à l'AFP plusieurs officiers ou directeurs des RG. "On meurt tout simplement", dit l'un. "Et que vont devenir nos renseignements dans une telle direction qui veut juste interpeller des malfaiteurs?".
"La police n'est pas partageuse et a plusieurs cultures qui foutent le camp", peste un directeur.
C'est une "réorganisation", une "mise en commun des moyens et des hommes", réplique-t-on à l'Intérieur, "le travail des RG est précieux et sera toujours utile aux préfets mais sous d'autres formes". Il "faudra trouver des passerelles", dit-on encore.
Le chantier avait été lancé par le Conseil des ministres le 20 juin. La ministre de l'Intérieur Michèle Alliot-Marie, bien qu'opposée publiquement à une fusion RG/DST, avait chargé le directeur général de la police nationale, Frédéric Péchenard, d'une "étude" sur ce sujet.
Elle lui sera rendue, selon l'Intérieur, "début septembre" et contiendra, "sauf imprévu", ces propositions jugées iconoclastes il y a encore quelques années.
(source : laprovence.com/AFP)