Depuis plus d'un siècle, Iantarny, petite ville de l'enclave russe de Kaliningrad, au bord de la mer Baltique, vit de l'exploitation de l'ambre. Elle a été choisie par moscou pour devenir un des quatre "Las Vegas" qui doivent être construits en Russie à partir de 2009.
Sur les 6.500 habitants de Iantarny (littéralement "d'ambre"), 300 travaillent à la mine d'ambre, la plus grande au monde, fondée bien avant que les Soviétiques n'occupent cette région allemande après la Seconde guerre mondiale.
Mais l'exploitation est au bord de la faillite et un dispositif de sécurité a dû être mis en place pour éviter le pillage d'ambre, dans cette région à l'économie chancelante.
Aujourd'hui, le maire de Iantarny, Alexandre Blinov, mise sur la reconversion dans le tourisme après la décision du président Vladimir Poutine de confiner tous les jeux de hasard dans quatre zones du pays à partir de juillet 2009, dont une dans la région de Kaliningrad.
"Avant, plus de 98% du budget de la ville venait de la mine d'ambre. Aujourd'hui, c'est de l'ordre de 40%", confie-t-il, enfoncé dans le siège passager de sa Lexus avec chauffeur.
Et le maire voit grand pour son Las Vegas : il rêve d'hôtels, de yacht-clubs et de golfs, en plus du grand casino et complexe immobilier qui doivent être construits aux abords de la ville, pour transformer sa bourgade réputée pour son importante criminalité en station touristique.
Jusqu'à dix milliards d'euros doivent être investis dans le gigantesque complexe immobilier autour du casino, qui prévoit notamment de créer jusqu'à 40.000 chambres d'hôtel, explique Oleg Danovski, responsable des investissements au sein de l'administration régionale.
Le chantier doit commencer cette année et devrait créer 20.000 emplois, une manne pour Iantarny, où le secteur immobilier est en pleine effervescence.
Dopé par le développement des premiers hôtels, le budget de la ville a déjà explosé en trois ans, passant de 30 millions de roubles (1,2 million de dollars, 860.000 euros) à près de 170 millions de roubles.
Les travaux de rénovation ont commencé dans les bâtiments de brique rouge construits par les prospecteurs d'ambre prussiens qui se mirent à exploiter la mine en 1872.
Parmi les participants à la reconversion de la cité figure l'arrière-arrière-petit fils du fondateur prussien de la mine, l'Allemand Ludwig Beckar, 70 ans, qui s'est lancé dans la rénovation d'un petit hôtel situé juste en face d'une église bâtie par son aïeul, Moris Beckar.
"Depuis trois ans, tout a changé avec cet argent venu de Saint-Pétersbourg et de moscou", dit-il, assurant lui aussi que "le tourisme est l'avenir" de la région.
Alors qu'il tente d'améliorer l'image de Iantarny et d'attirer les investisseurs étrangers, le maire mise sur l'étiquette de "ville de l'ambre" de sa cité en bord de mer, avec sa plage recouverte de sable bleu foncé rejeté par la mine à ciel ouvert, une fois expurgé de son ambre.
La transformation de Iantarny s'inscrit dans un projet plus large de moscou de développer la région de Kaliningrad, où un nouvel aéroport vient d'être construit, avec des liaisons vers une dizaine de villes d'Europe. Des millions de dollars ont aussi été débloqués pour développer des cités balnéaires tout le long de la côte.
Si les habitants de Iantarny se réjouissent de cette manne, nombre d'entre eux restent sceptiques quant à la transformation de leur ville en Las Vegas de la Baltique. Les représentants locaux de l'Eglise orthodoxe ont même lancé une campagne contre sa construction.
"Je suis contre. Qu'est-ce que cela va apporter aux gens sinon de la déception et le vol ?", critique Raïssa Karpova, future voisine du casino.
"On a besoin de gagner sa vie en travaillant, pas en jouant", critique lui aussi Vladimir, son voisin, gardien à la mine. "De toute façon, tout l'argent partira loin d'ici", ajoute-t-il, sans illusions.
(source : edicom.ch/AFP)