Aix-Les-Bains : rien ne va plus pour les patrons de casino aujourd'hui...
Les interdictions qui s'enchaînent sont pour eux de vrais boulets au pied. Les clients avaient déjà l'obligation d'éteindre leurs portables, puis de présenter leurs papiers d'identité. Au 1er janvier 2008, ils devront aussi écraser leur cigarette pour accéder aux salles de jeux. Mais la loi, c'est la loi. Alors les directions de casinos s'épient pour voir comment vont s'en sortir les autres.
Au casino Grand-Cercle d'Aix-les-Bains, le président de la Société du cercle, Paul Burnet, ne cache pas son agacement. «Près de 80 % de notre clientèle est fumeuse, alors cette nouvelle interdiction nous touche de plein fouet. Nombre de nos clients nous demande déjà s'ils pourront continuer à fumer...» Évidemment, pas devant les machines à sous. Mais la direction étudie actuellement un "plan" pour maintenir ses fumeurs dans l'enceinte des jeux. «Il est vital pour nous de conserver nos joueurs fumeurs près des jeux. S'ils doivent sortir de l'établissement, le charme est rompu. Si l'on ajoute qu'ils risquent de se prendre la pluie dehors en cas d'intempérie, et qu'ils devront ressortir une fois de plus leurs papiers d'identité pour revenir vers les machines, on comprend bien qu'il y a de fortes chances qu'on ne les revoie plus. ..» Un "système" devrait donc être mis en place pour laisser les accros de la cigarette au chaud.
Jean-Félix Roupioz, patron à Aix du "Nouveau casino", est, lui, plus transparent : «On s'achemine vers l'achat d'une cabine pour fumeurs. On n'a pas le choix, les joueurs sont en majorité des fumeurs, surtout ceux du poker. La cabine pourra accueillir deux ou trois personnes à la fois, pas plus. Ils devront faire la queue, mais on ne peut pas faire mieux...» Il est vrai que l'investissement requis n'est pas négligeable : ces gadgets coûtent entre 10 000 et 15 000 € ! Le "Nouveau casino" avait bien anticipé un peu, en plaçant, il y a un an déjà, 15 de ses 45 machines en zone non-fumeur. «Ça a amélioré les relations entre clients, mais on voit souvent les "non-fumeurs" aller s'en griller une côté fumeur. C'est donc bien que la grande majorité de notre clientèle fume.»
Paul Burnet s'est résigné lui aussi à démarrer une campagne d'information à l'attention de ses clients. Dès demain, jour de la Journée mondiale sans tabac, il posera symboliquement des affichettes dans son établissement pour avertir ses joueurs que son casino est "un espace de courtoisie" et qu'il convient de demander autour de soi avant d'allumer une cigarette, ou de prévenir gentiment son voisin si l'on est gêné par la fumée. «Pour aller plus loin, nous proposerons un coin "machines non-fumeurs", sans obligation draconnienne toutefois, même si les autocollants à la cigarette barrée seront apposés. En revanche, nous interdirons désormais la pipe et le cigare. Ce sera notre premier pas sur ce chemin de croix» lâche-t-il.
S'il reconnaît l'argument sanitaire, notamment vis-à-vis des employés, Jean-Félix Roupioz n'en demeure pas moins inquiet sur l'avenir des casinos : «Après le barrage de la pièce d'identité, voilà les cigarettes. On décourage vraiment les gens de sortir de chez eux. On avait déjà une concurrence sévère avec l'apparition des jeux en ligne sur internet. Cette mesure anti-tabac risque d'aggraver le phénomène...»
Après "boire ou conduire", voilà "jouer ou fumer". Les casinos, qui ont l'impression de subir la roulette russe, le vivent comme une deuxième balle dans le barillet...
(source : ledauphine.com/Muriel BERNARD)