La cour d'assises des Alpes-Maritimes a acquitté mercredi Jean-Maurice Agnelet de l'assassinat d'Agnès le Roux, une des héritières du casino le Palais de la Méditerranée, dont la disparition, en 1977, constitue la plus grande énigme judiciaire de la Côte d'Azur.
Après quatre semaines de débats, il a fallu cinq heures aux jurés de la cour pour blanchir du meurtre de son ancienne maîtresse, l'ex-avocat, âgé de 68 ans, qui a éclaté en sanglots à l'énoncé du verdict. Vingt ans de réclusion avaient été requis mardi à son encontre.
"Mes pensées sont pour Agnès le Roux. Je pense à mes enfants, quant à moi, on en parlera plus tard", a-t-il bredouillé à sa sortie du tribunal, la voie tremblante, tandis que ses avocats saluaient "une immense victoire pour la justice.
"La cour a été plus sensée que l'appareil judiciaire qui a renvoyé aux assises un homme qui ne devait pas l'être", a estimé Me Jean-Pierre Versini-Campinchi, l'un des défenseurs d'Agnelet.
Sous le choc, en larmes, la famille Le Roux est restée prostrée de longues minutes avant de quitter la salle d'assises. La mère d'Agnès, Renée Le Roux, 85 ans, qui avait fait de la condamnation d'Agnelet le combat de sa vie, ne s'est pas exprimée, "trop émue et trop abattue", selon son avocat Me Georges Kiejman.
"En tant qu'avocat, je ne peux pas regretter qu'une cour d'assises laisse la place au doute, même si ce n'est pas ma conviction, ni celle de la famille le Roux", a-t-il déclaré.
"Le doute béant" qui entachait ce dossier, selon Me Saint-Pierre, a effectivement constitué l'argument fort de la défense tout au long du procès et durant les six heures de plaidoirie finale.
"L'intime conviction, c'est beaucoup plus qu'une intuition, une impression subjective", avait plaidé Me Saint-Pierre en référence au portrait accablant de l'accusé, cynique et manipulateur, dressé par la plupart des témoins.
"L'acquittement est le seul verdict envisageable", avait-il martelé soulignant l'absence de preuves matérielles.
L'avocat général Pierre Cortes avait tenté de bâtir un scénario faisant d'Agnès l'instrument de la vengeance d'Agnelet contre Renée Le Roux, qui l'avait renvoyé du Palais de la Méditerranée où il travaillait comme avocat.
Le comportement d'Agnelet, indifférent après la disparition d'Agnès, le faux alibi qu'il était accusé d'avoir sollicité auprès d'une autre de ses maîtresses, les annotations portées dans plusieurs livres et qui semblaient se rapporter aux faits, la découverte, à son cabinet, de la photocopie d'une lettre d'adieu retrouvée chez Agnès, étaient, aux yeux de l'avocat général, autant d'"aveux involontaires".
"Charges insuffisantes !", avait martelé la défense. Tous ces éléments peuvent s'"interpréter dans tous les sens", prêtent à "double lecture" et "ne constituent pas des preuves judiciaires".
Au final, quatre semaines de débats n'ont pas permis de dire "où, quand, comment, par qui, Agnès Le Roux a été tuée", a répété Me Saint-Pierre pour qui il s'agit là des "questions fondamentales" d'un procès criminel. "Nous ne faisons que parler du contexte, de la psychologie des uns, des autres", s'était-il indigné en brandissant le spectre de l'erreur judiciaire.
Reste à savoir qui a tué Agnès Le Roux. Car tout en acquittant Agnelet, les jurés ont considéré que la jeune femme a effectivement été assassinée.
Pour Me Saint-Pierre, "la cour désigne vraisemblablement, sans le dire explicitement, la responsabilité de la mafia niçoise de ces années-là. Le combat pour la vérité ne s'arrête pas là".
(source : voila.fr/AFP)