Réglementation - Le président du premier groupe européen de casinos engage un bras de fer avec l’État français pour obtenir la libéralisation des jeux d’argent en ligne. Explications sur son action menée devant la Commission européenne.
Patrick Partouche, président du groupe français éponyme, propriétaire de 58 casinos en Europe, milite depuis 2002 pour que l'État autorise les cybercasinos. Mais depuis trois ans, le gouvernement fait la sourde oreille et défend le monopole de la Française des jeux (FDJ), seul acteur, avec le PMU, à avoir le droit de commercialiser des jeux d'argent en ligne.
À la tête du syndicat moderne des casinos de France (SMCF), le groupe Partouche vient de porter plainte contre l'État français devant la Commission européenne pour abus de position dominante et maintien de monopole injustifié.
ZDNet.fr - Pourquoi avoir décidé de porter l'affaire en justice?
Patrick Partouche - Depuis trois ans, l'État français n'a pas bougé d'un iota sur la question de la réglementation des jeux d'argent en ligne. La France veut à tout prix préserver en ce domaine un monopole injustifié de la Française des jeux (FDJ). Face à ce blocage, nous n'avions plus d'autre recours qu'une méthode plus musclée.
J'ai donc soumis au syndicat moderne des casinos de France (SMCF) l'idée de la plainte devant Bruxelles à l'encontre de l'État français. Cet organisme, qui défend notre profession, a considéré cela comme judicieux et a donc élaboré les détails de la procédure.
Je pense qu'elle a de très bonnes chances d'aboutir, car la situation a évolué dans d'autres pays européens. En Allemagne, la Cour suprême a mis fin au monopole local. Le Royaume-Uni a aussi ouvert aux casinotiers des licences d'exploitation de services en ligne. Une société cotée en bourse comme la nôtre ne peut s'interdire des relais de croissance comme le Net, simplement parce qu'un État veut préserver un monopole.
Qu'attendez-vous de cette procédure?
Nous voulons faire pression sur l'État pour qu'il organise une table ronde sur le sujet, à laquelle nous entendons participer. L'objectif sera de changer la réglementation en vigueur et de nous permettre d'opérer des services de jeux d'argent en ligne.
Notre volonté n'est pas de prendre spécifiquement des clients à la FDJ. Nous voulons pouvoir lutter à armes égales avec tous les opérateurs de jeux en ligne du monde, dont la FDJ. Il y a ainsi 2.000 sites étrangers de casino en ligne accessibles en France, face auxquels nous ne pouvons répliquer.
Si cela n'aboutit pas, j'ai déjà demandé une licence de jeux en ligne à Gibraltar, où nous pourront installer une filiale Internet. Mais je suis partisan du patriotisme économique. Je préfère créer des emplois et payer des impôts en France en développant une filière de contenus interactif. Dans ce domaine, la France est quasiment inexistante!
Que représente aujourd'hui ce marché des jeux d'argent en ligne?
Il n'y a pas de statistiques précises. Tout ce que l'on sait, c'est qu'il y aurait deux millions d'internautes en France qui utilisent ces services, notamment auprès des 2.000 sites étrangers qui ne génèrent aucune valeur en France.
Avez-vous lancé des services en dehors de la France?
Non. Nous entendons d'abord gagner la bataille dans l'Hexagone. Nous avons juste lancé un jeu d'argent légal sur téléphone mobile début avril à Londres.
(source : zdnet.fr/Christophe Guillemin)